NOM(S) - Tarabotti. Comme une écrivaine vénitienne méconnue du XVIe. PRÉNOM(S) - Asphodèle. Ouai, son père a pas trouvé plus compliqué. C'est un historien, après tout. L'asphodèle, c'est cette fleur que les grecs de l'Antiquité déposaient sur les tombes. On dit également qu'elle est la gardienne des enfers où les âmes ni bonnes, ni mauvaises, sont envoyées dans le Pré de l'Asphodèle. On a connu plus gaie, mais enfin. C'est plus sympa que Tulipe ou Renoncule, quand même. AGE ET LIEU DE NAISSANCE - Elle est née à Venise, le 26 octobre 1991. Elle est pas bien forte en maths, la petite Aspho, mais elle a fait le calcul pour vous : 22 années. NATIONALITÉ - Vénitienne (elle insiste bien là-dessus) pas italienne, de par son père. Française, par sa mère. STATUT CIVIL - Vieille fille. Elle veut pas que les choses évoluent. Elle est bien comme ça, toute seule avec elle-même. ORIENTATION SEXUELLE - Hétérosexuelle. C'est bien ça, le problème. Elle n'aime pas et elle aime les hommes. MÉTIER - Elle étudie l'histoire, comme son père et compte bien prendre la route menant à Venise dès qu'elle aura fini ses études. GROUPE - Cœur las ou âme amère... Je balance ! AVATAR - Astrid Bergès-Frisbey.

« Tu la connais, Asphodèle ? » Demande-t-il, son souffle comme un murmure. Comme s'il avait peur qu'on le surprenne. « Aspho-qui ? » L'autre lui répond sur le même ton. « Mais si, tu sais, Asphodèle. La fille qui vit dans la maison blanche. Celle qui s'est faite abandonner par son père, l'historien. Depuis, on dit qu'elle aime plus les hommes. Elle aime plus sortir. Elle préfère lire, sur la balançoire devant sa maison. Je passe à l'aube, elle y est déjà. Je repasse au crépuscule, elle y est encore. Elle dit que c'est mieux de vivre dans un rêve, on est moins déçu. Elle dit qu'elle veut rester vieille fille. Elle dit que c'est trop difficile d'être une femme. Mais elle hésite entre devenir un poisson et un oiseau. Alors, elle dit qu'elle voudrait être un poisson-volant. Moi, je trouve ça bizarre puisqu'elle sait pas nager. Elle a un petit air de mademoiselle parfaite, une miss-je-sais-tout en puissance. J'aime pas ses yeux. Ils ont un petit air triste et arrogant à la fois. Certains disent qu'elle a l'esprit vif mais, moi, j'y crois pas trop. Elle peut pas s'empêcher d'étaler sa science. Enfin, ça, c'est quand tu viens lui parler, alors autant te dire que c'est pas souvent. Certains disent qu'elle est pas bavarde, mais c'est parce qu'elle ne veut jamais parler la première et comme elle est invisible... J'aime pas la façon dont sa voix te découpe en morceau. Elle est désagréable, sa voix. Elle est acérée. Même si elle est discrète et qu'elle se déplace comme une ombre, y'a un truc chez elle qui fait qu'on la regarde. Mais pas longtemps. On jette un œil, et puis c'est tout. Juste pour s'assurer qu'elle existe bien. Chez elle, y'a un truc qui me dérange. Un truc d'éthéré. Je sais pas ce qu'y me fait penser ça, mais je crois qu'elle a quelque chose de très doux. De presque enfantin. En fait, je sais même pas pourquoi je te parle d'elle. » Il jette un regard par dessus son épaule. C'est bon, elle est pas là. « Non, je la connais pas, Asphodèle. » Répond l'autre. « Je croyais que c'était un fantôme. »

PSEUDO - Mel PRÉNOM - Mel ÂGE - 19 printemps T'AS CONNU LE FORUM OÙ - PRD COMMENTAIRE(S) - Je ne suis qu'amour ! POISSON PRÉFÉRÉ - Les poissons-volants CODE AVATAR -

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Regarde la, cette gamine. Oui, la petite brune qui court après les pigeons sur la Plaza San Marco. Elle doit avoir -quoi ?- huit ans ? Neuf ans ? Regarde comme elle sourit, Asphodèle. Ses dents blanches reflètent la lumière du jour. Il fait froid cet hiver mais, tu trouves pas qu'elle respire le soleil ? C'est clair qu'elle est heureuse. Heureuse comme une enfant pourrait l'être. Ses joues vermeilles nous hurlent la joie de vivre. Ses cheveux sombres, ils fouettent son visage comme la bise secoue les herbes folles des landes. Tu ne peux regarder qu'elle. Si tu détournes les yeux, elle pourrait s'envoler pour disparaître à travers la brume des nuages gris. Elle est aérienne, vaporeuse. Un peu plus et on pourrait croire qu'elle n'est pas réelle. On dirait un fantôme, Asphodèle. Fait attention. Ne détourne pas le regard. Tu voies, derrière elle, les deux personnes qui la suivent ? On dirait ses parents.

Trop tard. Tes yeux ont été attirés autre part. Maintenant, elle sourit plus. L'écho joyeux résonne comme le rire des morts à tes oreilles. Ses prunelles, elles brillent plus du même éclats qu'avant. Regarde comme elles sont tristes. Elle a envie de pleurer, ça se voit. Elle est en colère aussi. C'est parce qu'elle ne comprend pas, Asphodèle. Elle a changé, son attitude. On dirait que c'est plus une enfant. On dirait qu'elle a vieilli d'un coup. Ça fait un moment qu'elle ne court plus après les oiseaux. Elle a compris qu'elle ne pourra jamais arpenter les cieux avec eux. Tu as remarqué ? Son père, il a disparu. Y'a plus que sa mère, derrière elle. Tu sais ce qu'on dit, sur son père ? Non ? Y'en a qui disent qu'il est parti pour voyager à travers le monde. D'autres qui pensent qu'il s'est enfui avec une autre femme. Moi, j'y crois pas. Le bruit court aussi qu'il s'est noyé. Il a disparu comme ça, sans laisser de traces. Quoi de mieux que les flots pour tout emporter, même le bruit d'une existence ? Je te pose juste la question, t'es pas obligé d'y répondre.






C'est pas beau, l'Angleterre. Le soleil n'est jamais au rendez-vous. Et Asphodèle, elle en a besoin, du soleil. Ça fait un moment qu'elle a toujours froid. Ses os, ils grelottent dans son corps d'enfant. Ses yeux, ils te percent. Ils sont gelés. Quand elle te regarde, tu vois bien qu'il y'a un truc qui tourne pas rond. Tu voies qu'elle est un peu bizarre. Elle a pas l'air méchante, juste un peu... Tu saisis ? J'irais pas jusqu'à dire qu'elle est folle, mais bon. Elle est toute cassée, Asphodèle. Et personne n'est là pour la réparer. Alors elle continue de grandir, du mieux qu'elle peut.

C'est pas beau, l'Angleterre. C'est blanc. C'est noir. C'est gris. Elles sont où les couleurs ? Elle en a besoin, Asphodèle, des couleurs. Sinon, elle a l'impression qu'elle va mourir. Elle a tendance à s'accrocher à de petites choses. Insignifiantes, futiles. Pourquoi la mer l'a-t-elle fait échouer ici ? Encore cette saleté de mer. Tout est toujours de sa faute. Pourquoi la mère l'a-t-elle fait échouer ici ? Elle y peut rien. Elle avait plus que là où aller, sa mère. Sur ce bout de côté immaculée qui sent le sel et les embruns. Ouai, sur cette croute de terre qui pue la poiscaille.

C'est pas beau, l'Angleterre. L'eau, elle est partout. Elle est dans le ciel. Elle est au pied des falaises. Elle t'encercle et elle veut plus te laisser partir. Ça lui fait peur, à Asphodèle. Elle a l'impression qu'elle va se noyer. Qu'elle va sombrer dans le noir. Les flots, ici, c'est pas les mêmes qu'à Venise. Ici, ils sont violent. Ils sont sauvages. Quand ils percutent ta peau, tu crois que l'écume veut te l'arracher pour ne laisser que tes os. Comme les hommes. Eux, ils te dévorent comme si t'étais de la viande hachée. Et puis après, quand ils ont plus faim ou qu'il y'a plus rien à manger, ils prennent la poudre d'escampette. Ils se cassent et ils te laissent, toute vide, derrière eux. Ils se retournent pas. Ils te regardent pas. Alors Asphodèle, elle a l'impression qu'elle est invisible. Qu'enfin, elle est devenue un fantôme.






Asphodèle ? Ça fait un moment qu'on la voit plus. Elle est plongée dans l'imaginaire. Jour et nuit. Nuit et jour. Elle lève pas le nez de ses vieilles pages. Elle dit qu'elle étudie. Qu'elle ne sortira pas tant qu'elle n'aura pas la certitude de rentrer chez elle. Non, Douvres, c'est pas chez elle. Elle s'approche toujours pas de l'eau. Elle s'approche toujours pas des hommes. Y'en a qui disent que la flamme folle dans ses prunelles, ben, ils disent qu'elle brille fort. N'oses même pas la contredire, elle te dirait le reste. Elle se croit plus maligne que tout le monde. C'est le temps et l'amertume qui l'ont rendue comme ça. Elle est aigre-douce, Asphodèle.

Son palpitant, il a tellement bu sa rancœur, qu'il en est imbibé comme une vieille éponge. Maintenant, elle dit qu'elle en a plus, de rancœur. Elle en avait marre d'embêter le monde alors, elle lui parle plus, au monde. Elle attend que le monde s'approche. Mais il faut qu'il le fasse doucement. Parce que sinon, elle risque de s'éloigner. On dirait un animal effrontée. Chat échaudé craint l'eau froide. Enfin, elle dit qu'elle est partie, la peur. Évaporée, sa peur. Les gens, elle s'en fiche bien. Pourtant, elle attend qu'une chose, Asphodèle. C'est que les autres, ils viennent vers elle. Après tout, elle se dissout, elle s'évapore dans le néant car, s'il n'y a personne dans le monde qui tient à toi, est-ce-que tu existes, au fond ? Et si tu n'existes pas, tu n'es pas mieux qu'un fantôme.