« l’on hait avec excès lorsque l’on hait un frère. »
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Sujet: « l’on hait avec excès lorsque l’on hait un frère. » Dim 28 Juil - 18:11
l'on hait avec excès lorsque l'on hait un frère.
Un baiser puis un autre, quelques effleurements à peine innocents, des murmures témoignant de notre désir commun, il avait suffi de peu pour que le beau brun me rejoigne dans ma chambre. Il avait pas été bien difficile à convaincre, mais ça faisait déjà trois ou quatre jours qu’on se tournait autour et j’étais pas du genre patient. Alors j’lui avais lancé un ultimatum et ça avait fonctionné mieux que je n’l’aurais pensé. A notre arrivée, j’avais déjà presque perdu mon t-shirt et on s’empressait de monter à l’étage pour être tranquilles. Je le poussai sur le lit, sur lequel il s’étendit comme s’il s’offrait à moi. Le regard que je posais sur lui n’avait rien de tendre. Et chacun de mes gestes était brutal, sauvage, parce que j’me foutais bien de lui faire mal. C’était qu’un mec parmi tant d’autres, certainement pas le dernier d’une liste interminable. Il était pas beau, il était baisable. Il était pas un être humain, il était qu’un objet de plaisir sans intérêt particulier. Je l’aimais pas, parce que c’était pas mon frère.
Je profitais de son absence pour assouvir la vengeance que je ruminais depuis une bonne semaine. J’avais patiemment attendu qu’il parte au boulot et que ma mère s’absente pour je ne sais quel affaire en ville, et j’avais commis l’affront ultime. J’avais ramené quelqu’un, et j’l’avais sauté dans notre lit. Le nôtre, celui qu’on partageait depuis toujours et qui avait vu naître l’obsession qui me rendait vivant. Et pendant que je faisais crier ma victime, j’pensais à la tête qu’il ferait quand il rentrerait et qu’il me trouverait là à lui prouver que moi aussi j’pouvais lui faire mal. Jusqu’ici, je lui avais jamais rien caché de mes écarts charnels, il savait que je m’envoyais en l’air à droite à gauche avec à peu près tout et n’importe quoi mais cette fois, il allait me voir en action. J’étais peut-être un monstre, mais moi j’avais un cœur et il était entièrement dédié à Travis, contrairement à lui qui avait laissé les mains d’un autre le toucher, ses lèvres l’embrasser. Lui, il avait fait ça parce que ce mec, ce Ronan, lui plaisait vraiment et je pouvais pas supporter de pas être le seul. Il était à moi, il était ma propriété et personne avait le droit de se l’accaparer comme ça, surtout pas ce connard que j’avais réussi à écarter de sa vie pendant suffisamment longtemps pour ne plus m’en inquiéter. Il était revenu et il allait me le payer très cher, mais ce serait pas le seul à souffrir. Moi j’prenais mon pied, je balançai des coups de reins comme un animal enragé qui aurait besoin de se défouler après une chasse ratée, j’griffais le dos de l’inconnu à sang ; j’imaginais que c’était celui de mon double et que je lacérais sa peau avec mes ongles pour qu’il comprenne qu’il avait pas le droit de me faire du mal à moi. J’étais le seul bourreau et je tenais à le rester.
J’atteignis l’extase à l’instant où la porte s’ouvrit sur le visage de Travis. Le râle qui s’échappa de mes lèvres se mua très vite en éclat de rire au risque de vexer mon amant qui s’était avéré être un assez mauvais coup mais de toute façon, j’avais pas l’intention de le revoir. Il n’était que l’instrument d’une revanche bien méritée. Sa gêne n’arrangea rien à mon hilarité, sans doute qu’il appréciait pas de se retrouver nu devant mon frère alors il récupéra son boxer en vitesse avant de s’engouffrer sous la couverture pendant que je me relevais pour aller jeter le préservatif usagé, sans même me soucier de la présence de mon jumeau. J’étais sûrement allé trop loin mais c’est bien ce que j’adorais moi, dépasser mes limites et jouer avec le feu. Là, je venais de créer l’étincelle qui se transformerait assurément en brasier destructeur et pourtant, j’avais pas peur. J’avais peur de rien en fait, si ce n’est de perdre le contrôle de la situation comme ça avait été le cas lorsque j’avais appris qu’il avait perdu sa virginité avec un autre. Rien qu’à y repenser, la rage s’emparait de nouveau de mon être mais je tentai de la réprimer pour la déverser un peu plus tard sur la personne qui m’avait brisé le cœur. On allait encore jouer et je m’en réjouissais d’avance. En revenant, je lui offris un sourire radieux et me plantai devant lui, tout en faisant signe au gars de se tirer le plus vite possible, parce que je me doutais que mon comportement n’avait pas plu à Travis et que l’affrontement qui allait suivre serait des plus sanglants mais j’l’avais bien cherché et je regrettais pas le moins du monde.
made by pandora.
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Sujet: Re: « l’on hait avec excès lorsque l’on hait un frère. » Sam 3 Aoû - 15:18
Mon portable se mit à vibrer férocement, annonçant la fin de ce délicieux sommeil réparateur dans lequel j’étais plongé. Il était trois heures du matin et Kiran dormait encore à poings fermés. J’avais aucune envie de me lever aujourd’hui. Les récents événements avec mon jumeau m’avaient plus que perturbé. La scène de la douche m’avait littéralement anéanti. J’étais apeuré à l’idée de décevoir Kiran tout comme j’étais apeuré à l’idée de rester prisonnier de ses griffes toute ma vie. Je voulais que les choses changent mais je n’en avais pas la force. Je n’avais pas la carrure de lui tenir davantage tête. J’en venais à me dire que ce que j’avais fait avec Ronan avait été une fondamentale erreur. J’étais pris entre deux feux, tiraillé entre deux amours interdits — bien que je souhaiterai plus que tout au monde ne pas ressentir de tels sentiments envers mon propre frère. C’était plus fort que moi. Il était plus fort que moi. Je crois même que c’est écrit dans notre ADN. Kiran, dominateur. Et moi le pauvre insecte qui ne faisait que subir. C’en était pitoyable. Mais je ne voyais pas comment ça pouvait être autrement.
Je le regardais par-dessus son épaule, fébrile. À le voir ainsi, j’étais persuadé que personne ne pouvait imaginer qu’en lui se cachait un monstre de la pire espèce. Un être vil et manipulateur dominé par ses penchants contre-nature. Il semblait si paisible, si enfantin. Ses traits angéliques ne trahissaient en rien ses démons intérieurs. Au contraire, ils attendrissaient ses proies. Pour autant, même si j’éprouvais pour lui autant de haine que de dégoût, l’amour que je lui portais n’avait aucune limite. Et j’en venais à avoir peur de moi-même. Comment pouvais-je encore l’aimer après tout ce qu’il faisait ? Je savais qu’il tenait à moi. Je savais qu’il éprouvait certainement des sentiments encore plus forts que ceux qu’il daignait reconnaître parfois. Mais je ne comprenais pas d’où lui venait ce comportement, cette façon violente de déclarer sa flamme. Chez Kiran, aucun de ses actes n’était mu par gentillesse ou par générosité. Tout était fait méthodiquement, avec égoïsme et narcissisme. Faisait-il la même chose avec moi ?
Kiran était dos à moi, j’étais tout contre lui. Je me retirai doucement de notre cocon, me rendant compte de mon érection matinale, encore collée à ses fesses quelques secondes auparavant. Je piquai aussitôt un fard, comme si quelqu’un aurait pu se rendre compte de ce geste profondément immoral. Je tâchai de me lever rapidement du lit de fortune tout en essayant de rester le plus discret possible. Je n’avais aucune envie de réveiller Kiran et d’affronter dès le matin son regard assassin. D’autant qu’il n’était généralement jamais de bonne humeur au réveil. Ramassant par terre quelques affaires sans vraiment savoir à qui elles appartenaient, j’observai ce corps à demi-nu dans la pénombre. Notre chambre n’avait rien d’une habituelle chambre d’adolescents. La peinture était craquelée sur la plupart des murs et un simple matelas en mauvais état faisait office de lit. Heureusement, les draps propres de maman qui sentaient le frais arrangeaient quelque peu le tableau. Je finis par tourner la poignée de la porte pour m’extraire hors de notre sanctuaire. Après être passé quelques minutes à la salle de bains, j’étais prêt pour une dure journée de labeur. J’avais mis ce qui m’était passé sous la main; de ce fait, j’avais enfilé le boxer de la veille de Kiran et aussi son tank blanc. J’avais réussi à retrouver toutefois mon jean noir. Et avant de sortir de la maison, je me passai aux pieds les chaussures de mon jumeau, des vans noires vieillies qu’il avait récupéré je ne sais où. Je n’étais pas vraiment propre, mais je m’en fichais. Pour une journée de travail de docker au port, ça n’avait absolument pas d’importance. Comme à mon habitude, je laissai un petit mot d’amour sur le frigo adressé à ma mère et je quittai le foyer pour m’enfoncer dans les rues sombres de Douvres jusqu’au bord de mer. Il était trois heures trente et j’allai subir ma plus longue journée de la semaine, douze heures de travail ponctués de deux insignifiantes pauses de dix minutes. Mais je l’avais voulu, c’était important pour moi d’aider ma mère qui nous faisait vivre à bout de bras avec ses quelques heures de femme de ménage.
∞
Quatorze heures trente. J’avais enfin fini cette journée. J’avais les bras et les pieds en compote, mais l’idée de retrouver ma mère et mon frère me donnaient des ailes. Je puisais dans mes dernières forces de refaire le trajet du matin en sens inverse. Enfonçant mes mains gelées dans les poches de ma parka couleur kaki, je déambulais fébrilement dans les rues de Douvres. Bientôt, j’arrivai devant la porte de notre petite bicoque que j’ouvris rapidement pour me glisser à l’intérieur et me mettre au chaud. À ma grande surprise, personne ne m’accueillit. Je fis rapidement le tour de la cuisine et du petit salon. Ma mère n’était pas là, sûrement était-elle partie faire une course. En revanche, que mon frère ne soit pas là, ça me paraissait plus qu’étrange. Lui qui mettait un point d’honneur à me surveiller constamment, il aurait dû être là. Soit son travail l’avait appelé en urgence — ceci dit, une urgence de libraire, ça aurait été une première dans toute l’histoire de l’univers —, soit il était parti chasser — entendez par-là «draguer» en langage kiranien —, soit il me faisait une petite blague. J’espérais secrètement que ce soit la première option. La seconde ne me plaisait absolument pas et la troisième me faisait flipper. Parce que oui, j’étais un garçon trouillard et pleurnichard. Et ça, Kiran l’avait bien compris.
Finalement, usé par tant de questions galopant à toute vitesse dans mon esprit, je me débarrassai de mes chaussures pour monter l’escalier. J’avais toujours eu un pas léger et force était de constater que même en me pensant seul, je ne faisais aucun bruit. Cette idée m’arracha un sourire satisfait alors que j’entrai dans la salle de bains pour me passer un peu d’eau sur le visage. Je relevai le chef, observant ma mine fatiguée dans le miroir. Fort heureusement, malgré mes traits tirés et mes cernes quelque peu apparentes, je restai un adolescent comme les autres, sans les boutons — peut-être le rythme effréné de mes journées et mes efforts dans le travail avaient fait rendre gorge à mon acné. Déboutonnant mon jean noir, je retirai ensuite mes chaussettes que je balançai avec nonchalance dans le panier à linges avant de me poster devant la porte de notre sanctuaire. Sans réellement savoir pourquoi, alors que je posai une main sur la poignée, un étrange pressentiment s’empara de moi tel un poison s’insinuant dans mes veines. Je tournai la poignée et poussai la porte d’un geste assuré sans pour autant avancer. Là, devant moi, Kiran baisait avec un inconnu. Kiran ne faisait pas l’amour avec ses proies, oh non, il les baisait. Il prenait un malin plaisir à les humilier. Et pour la présente victime, l’humiliation était certainement totale. Le pauvre garçon, tombé dans les filets d’un psychopathe, pris à quatre pattes comme un chien, surpris par quelqu’un. Ce quelqu’un, moi, témoin de la honte parfaitement lisible sur son visage innocent. Kiran, lui, avait atteint l’extase au moment où la porte s’était ouverte sur cette scène immonde. Il avait fait jaillir sa semence dans un râle qui s’était rapidement mu en un éclat de rire totalement inapproprié. À croire qu’il avait retenu son orgasme jusqu’à maintenant pour que je puisse en être témoin. Il finit par s’extraire de l’inconnu qui, lui, récupéra son boxer à toute hâte pour aller l’enfiler sous la couette dans une gêne tangible et humiliante. Kiran ne sembla pas se soucier de ma présence lorsqu’il se dirigea dans un coin de notre chambre pour y jeter le préservatif usagé. Finalement, après être revenu au centre de la pièce dans une démarche assurée et presque irritante, mon jumeau se planta devant moi. Nu, encore un peu transpirant de l’exercice précédent, il planta son regard noir et sans peur dans le mien. D’un geste de la main nonchalant, il fit signe à sa proie de quitter les lieux. Congédié sans ménagement. L’inconnu à présent vêtu passa à mes côtés, tête baissée, le visage grave, silencieux. La porte d’entrée claqua. Je fis un pas pour rentrer dans notre sanctuaire. Comment devais-je réagir ? Voir Kiran en telle position me faisait rager. Intérieurement, je bouillonnais. Je n’avais aucune envie qu’il pose ses mains sur quelqu’un d’autre lorsque de son côté il m’interdisait d’en faire autant. Je n’avais aucune envie de le voir torturer quelqu’un. J’en venais à éprouver de la sympathie pour ce pauvre garçon qui venait de se faire joliment humilié. Au fond, lorsque je m’abandonnais à la folie de mon frère, c’était comme pour protéger autrui de ses griffes. Un sacrifice qui n’en était pas réellement un, car les sentiments que j’éprouvais à son égard étaient eux bien réels.
Faisant toujours face à mon frère, je portai lentement ma main à la porte et, d’un geste inattendu, je la fis claquer violemment. Je soutins son regard et, m’avançant vers lui, ma main fusa jusqu’à sa joue, lui flanquant une gifle monumentale. C’est la réaction que tu attendais ? Tu es assez satisfait ? Aussitôt, je regrettai mon geste. Je savais que Kiran allait réagir plus vivement, plus violemment encore. S’il avait osé copuler avec un inconnu dans notre propre chambre, ce n’était certainement pas par pure envie. Oh non, je connaissais bien assez mon frère pour savoir qu’il avait très probablement une autre idée derrière la tête. Vas-y, je t’en prie, déballe ton sac. T’en meurs d’envie.
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Sujet: Re: « l’on hait avec excès lorsque l’on hait un frère. » Sam 3 Aoû - 18:36
C’était comme si Travis avait brisé quelque-chose en moi. J’étais déjà bien amoché, je l’savais, j’étais même, selon toute vraisemblance, complètement taré. Parfois, il m’arrivait de me faire peur à constater avec quelle facilité je manipulais mon entourage sans le moindre remord. J’étais capable de tout, et surtout du pire. Dans ce domaine, j’excellais. Mais là, j’avais l’impression d’avoir perdu une partie de moi, et c’était d’ailleurs pas vraiment faux. Je sentais qu’il m’échappait, qu’il me filait entre les doigts comme de la fumée qu’on essaie de rattraper en vain. J’étais impuissant. Pour la première fois de ma vie, je ne pouvais rien faire pour le retenir auprès de moi. J’me rendais compte que c’était mon côté sombre qui l’avait poussé à partir, à expérimenter la douceur et la tendresse dont il avait tant besoin mais je ne pouvais pas m’empêcher de vouloir le contrôler, parce qu’il m’appartenait. Et je lui appartenais aussi, même s’il était persuadé du contraire. J’avais beau me réveiller dans des draps différents trois fois par semaine, je pensais jamais à personne d’autre que lui. J’l’avais dans la peau, dans la chair, jusque dans mon ADN il était présent. Du matin au soir, je vivais pour lui. C’était uniquement par peur de l’abandonner que j’m’étais pas encore barré de chez moi, mais désormais plus rien ne me retenait. Et malgré ça, j’arrivais pas à partir.
« J’ai rien à t’dire. » assénai-je froidement. C’était pas tout à fait vrai, en réalité j’aurais voulu le frapper jusqu’à ce qu’il pleure tellement j’avais mal mais j’pouvais pas me résoudre à lui rendre la monnaie de sa pièce autrement qu’en imaginant ce genre de plan machiavélique pour lui faire comprendre que son comportement était inacceptable et incroyablement odieux. C’était tellement plus facile comme ça, ça me ressemblait tellement plus que de fondre en larmes ! Et pourtant ça m’suffisait pas. J’avais besoin qu’il se rende compte de ce qu’il m’avait fait. « En fait si, y a bien une question que j’aimerais te poser. » En même temps que je prononçais ces mots, je lui tournais le dos pour aller ouvrir la seule fenêtre de notre chambre et y grimper en laissant mes jambes balloter dans le vide. J’observai longuement le sol, à quelques mètres plus bas, avec une envie irrépressible d’y atterrir à une vitesse fulgurante. Ça résoudrait tout, Travis pourrait continuer de se faire sauter par qui il voulait, notre mère serait probablement plus tranquille en pensant que mon jumeau n’aurait plus à s’inquiéter de mon influence néfaste, et moi j’arrêterais purement et simplement de souffrir. Au lieu de ça, je continuais à parler, à déblatérer inutilement tout en sachant que rien ne pourrait apaiser la douleur que j’éprouvais à l’imaginer amoureux d’un autre. « T’as aimé ça ? T’as aimé qu’il te touche, qu’il t’embrasse ? C’est vrai quoi, j’suis ton grand-frère, c’est le genre de choses qu’on est supposés s’raconter non ? Alors vas-y, sois pas gêné, dis-moi tout ! » lançai-je de mon sourire suffisant, celui qui masquait le mieux la souffrance intolérable qui était la mienne. J’étais trop fier, trop égocentrique pour oser admettre que mon existence tournait autour de la sienne, malheureux pour avouer ma dépendance malsaine à ces grands yeux bruns qui semblaient m’achever sitôt qu’ils se posaient sur moi.
Adossé sur le rebord de la fenêtre, j’évitais soigneusement de le regarder ; il ne s’agissait pas là de lâcheté mais je n’avais simplement pas envie de déceler la moindre parcelle d’émotion vive sur son visage parce que je savais pertinemment que je n’en étais pas maître. A évoquer ainsi cette nuit, j’étais pris de haut-le-cœur, j’avais envie de vomir toute la haine qui tiraillait violemment mon estomac depuis que j’avais appris ce qu’il avait fait. Il se croyait fort là, il savait qu’il m’avait fait mal comme jamais personne avait su m’atteindre, il jubilait intérieurement, j’en étais sûr. Et la jalousie me bouffait de l’intérieur au point que j’en oubliais presque que je lui faisais subir le même sort chaque semaine, à coucher avec n’importe qui. Mais moi j’me souciais pas d’ces mecs, j’les revoyais jamais, ils étaient de passage dans ma vie et lui seul avait droit à un statut particulier. Travis était trop sentimental pour s’envoyer en l’air avec le premier venu, Ronan l’avait touché, quelque part, il ne s’effacerait jamais vraiment et je refusais catégoriquement de partager ma moitié avec un autre. Mais j’me taisais, parce que j’aurais préféré mourir que de lui dévoiler une faiblesse qui causerait ma perte à coup sûr. « J’espère que c’était bon. Une première fois c’est important hein. T’oublieras jamais son prénom. Jamais. » Cette constatation m’arracha un rictus mauvais, parce que je prenais douloureusement conscience de l’importance que ce mec prendrait dans la vie de mon frère. Savoir que je n’étais plus le seul me rendait malade, mais plus encore, j’étais terrifié à la simple idée que Travis puisse lui accorder plus d’intérêt qu’à moi. Je pouvais pas laisser faire ça, c’était au-dessus de mes forces. On avait toujours tout traversé ensemble et c’était certainement pas ce connard qui allait venir nous séparer maintenant, même si j’ignorais encore comment j’allais gérer la situation. Je devais jouer finement sans prendre le risque de dévoiler aux yeux du monde l’amour incommensurable que je portais à mon jumeau mais il fallait que je sois suffisamment intimidant pour empêcher Ronan de revenir lui tourner autour car j’étais certain d’une chose : si j’apprenais qu’ils continuaient à se voir, toutes les barrières que je m’imposais encore pour ne pas lâcher le monstre qui sommeillait en moi tomberaient inévitablement les unes après les autres.
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Sujet: Re: « l’on hait avec excès lorsque l’on hait un frère. » Ven 23 Aoû - 23:47
Je lui faisais face de mon mètre soixante-dix-huit. Lui était tout aussi grand que moi. Pourtant, il paraissait beaucoup plus imposant. Beaucoup plus assuré. Il diffusait une aura oppressante, écrasante, qui mettait mal à l’aise n’importe lequel de ses interlocuteurs. Encore plus quand il s’agissait de moi, son propre frère. J’avais toujours campé ce rôle du cadet — certes de quelques minutes seulement — craintif, constamment dans l’ombre de son frère, s’empêchant de briller pour lui céder la place. Ça ne m’avait jamais frappé ni dérangé jusqu’à un certain moment. Jusqu’à ce que je me rende compte que Kiran n’avait pas d’aussi bonnes intentions que je l’espérais. Parce qu’au final, Kiran n’en avait tout simplement aucune. Rares étaient les fois où j’avais eu l’impression qu’il était réellement sincère avec moi. Il l’était à sa manière, mais je n’en savais rien. Il n’avait jamais appris à faire comme les autres, à s’exprimer comme tout le monde le faisait. Il pensait que tout passait par le mensonge et la violence. Qu’il n’y avait aucune place pour lâcher prise. Qu’il fallait constamment tout contrôler. Jusqu’à contrôler ma propre vie. Jusqu’à ce que je cède à vivre à travers lui. Il était devenu mon repère, le phare au milieu de la nuit noire, l’étoile polaire dans le ciel obscur. Je n’avais plus aucune vie sociale et passais mes journées à effectuer les mêmes rituels. Me lever, manger, travailler, rentrer, manger, dormir. Et Kiran était là constamment. Même quand je travaillais, il était avec moi, dans mes pensées, dans mon âme. Chaque cellule de mon corps tremblait à l’idée de le savoir aussi intrusif. Mais je ne pouvais me résigner à échapper à sa vigilance. J’étais tiraillé entre l’amour incommensurable que je lui portais naturellement et cette envie de briser les chaînes qu’il m’avait passées autour des poignets et des pieds. J’avais même parfois l’impression d’en avoir une autour du cou.
Ronan avait été mon échappatoire, ma porte de secours. Par deux fois il m’avait charmé, par deux fois j’avais cédé. Ses grands yeux couleur noisette m’avaient fixé avec une telle tendresse que j’en avais été mal à l’aise. Pas mal à l’aise comme avec Kiran, non. Mal à l’aise par timidité. Par fascination. J’avais été subjugué, tant par sa beauté que par sa gentillesse. Peut-être certains le trouvaient banal à en mourir, mais moi je voyais en lui la perfection. Il était tout ce que Kiran n’était pas; attentionné, prévenant, rieur, sincère, léger. Tout coulait de source avec lui. Rien n’était impossible. Il n’avait pas renoncé à moi. Je savais pourtant que Kiran avait été à sa rencontre et qu’il l’avait fait fuir comme il le faisait avec chacune de mes connaissances. Mais Ronan n’avait pas baissé les bras. Peut-être me considérait-il comme un défi, une façon de provoquer mon frère… Je n’en savais rien. Et j’avais eu peur de connaître la réponse. Alors je m’étais tue. Si la première fois je n’avais rien fait à part goûter à ses douces lèvres sucrées, la seconde en revanche, je l’avais laissé découvrir mon corps avec passion et tendresse jusqu’à l’extase totale. Il s’était répandu en moi avec une telle douceur que j’en fus émerveillé. Cet émerveillement n’avait évidemment duré qu’un temps puisque Kiran avait fini par tout découvrir de ma propre bouche le soir-même. À mon grand étonnement, il n’avait rien fait sur le moment. Il s’était contenté de déverser quelque peu sa colère sur moi sans pour autant en faire une affaire d’état. Un comportement qui ne lui ressemblait guère et qui annonçait l’explosion prochaine de cette bombe à retardement qu’était devenu Kiran. Et ce jour était arrivé. En ce moment-même. Là, devant moi, Kiran s’était employé à mettre sa vengeance en marche. J’en étais la première victime, mais certainement pas la plus amochée. Ronan suivrait assurément derrière. Encore plus violemment. J’en étais persuadé.
Kiran me scrutait d’un regard aussi froid que l’acier. Au début, il ne voulait rien lâcher. J’avais osé porter la main sur lui avec cette gifle monumentale qui trahissait ma douleur intérieure. Et il n’avait pas bougé d’un poil. Je me sentais trahi, trompé, souillé. Il ne me venait pas à l’esprit que je lui avais fait subir la même chose quelques jours auparavant avec l’annonce de ma toute première fois avec Ronan. Je le pensais plus fort que ça, plus résistant que moi. Lui, après tout, s’envoyait en l’air avec des inconnus trois fois par semaine. Et il s’était bien fichu de ce que je pouvais ressentir dans ces moments-là. Mon acte avait été légitime. Sincère. J’étais différent de lui. Il le savait.
Finalement, il se dirigea vers la fenêtre de notre chambre pour l’ouvrir et s’installer sur le rebord, laissant ses jambes pendre dans le vide, m’assenant avec une liste de questions fulgurante. Je l’observais sans broncher, attendant une quelconque autre réaction de sa part. Il avait la tête baissée, le regard sûrement rivé vers le sol qui se trouvait plusieurs mètres plus bas. Jamais il ne sauterait. Il me regardait à présent par-dessus son épaule, affichant ce sourire suffisant qu’il avait l’habitude de prendre lorsqu’il lançait ses petites attaques verbales acérées. J’en perdais l’assurance que j’avais eue en découvrant sa coucherie. Mes forces semblaient me faire faux bond, s’échappant elles aussi de ce sanctuaire malsain. Mes yeux bruns cherchèrent avec un peu de panique un point de repère dans leur champ de vision mais je revins aussitôt sur son regard insistant. Vêtu du simple tank gris de mon frère et pieds nus, je tremblais de froid. L’air glacial du dehors s’engouffrait par la fenêtre ouverte pour imprégner les murs, les draps et les vêtements du froid anglais. Et avec une isolation non existante dans cette chambre — qui servait autrefois de grenier —, la nuit risquerait d’être particulièrement rude. Et la chaleur de mon frère ne me serait certainement d’aucune aide tant la situation était mal partie. Kiran, je… J’ouvris la bouche mais seuls ces deux mots purent sortir. En vérité, je ne savais absolument pas quoi lui dire. Son regard disparut derrière son épaule et il se reprit à fixer le sol. Je me passai une main fébrile dans ma touffe hasardeuse non coiffée de cheveux. J’avais envie de me les arracher tellement j’en avais ras le bol de ces crises qui témoignaient d’une relation purement immorale. C’est pas le genre de choses que j’ai envie de partager avec toi, Kiran. lançai-je d’un ton neutre. Je me dirigeai d’un pas nonchalant vers notre paillasse qui faisait office de lit et je me laissai tomber sur les fesses dans la couette pour m’assoir. Kiran ne m’accordait plus aucun regard et gardait le dos tourné, adossé au chambranle de la fenêtre. À l’observer, je savais que j’avais touché dans le mille en m’abandonnant aux bras de Ronan. Je n’avais pourtant pas fait ça pour ça. Pas pour le blesser. La relation que j’avais eue avec Ronan s’était faite naturellement, sans arrière-pensée. Avoir joint l’agréable à l’utile sans m’en rendre compte me procurait un plaisir non dissimulé. Je souriais. Tu ressens au moins ce que je subis depuis toujours, à te voir te pavaner aux bras de conquêtes éphémères qui disparaissent les unes après les autres. Mes mains firent glisser mon jean sur mes cuisses et le long de mes jambes avec une certaine lenteur. J’étais pensif, hanté par le visage angélique de Ronan mais aussi par le regard noir de mon frère. Le jean se retrouva par terre dans un coin de la pièce et je commençai à me masser les cuisses, endolories tant par le froid que par cette journée de travail atroce. J’suis fatigué de me battre avec toi, de toujours devoir faire bonne figure. Alors non, j’suis pas ton jouet. Et non, tu m’empêcheras pas de le revoir. Mes doigts longs et fins massaient mes muscles exténués alors que mon regard guettait la moindre réaction de Kiran. Un Kiran que je voulais sincère et près de moi. Un Kiran attentionné et sensible qui saurait me prendre dans ses bras pour me dire à quel point il tient à moi. Mais ça, ça n’arrivera sûrement jamais. Parce qu’il s’agit de Kiran. Ce monstre.
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Sujet: Re: « l’on hait avec excès lorsque l’on hait un frère. » Sam 24 Aoû - 20:34
C’est terminé Kiran. Tu as été trop loin, tu t’es perdu dans les méandres d’un amour obsessionnel qui t’a rendu fou. La raison t’a abandonné, tout comme ton jumeau qui ne peut même plus te regarder en face. Il ne te reste que les yeux pour pleurer, mais les monstres ne pleurent pas. Il te voit comme un monstre. Et il est le seul à te connaître mieux que toi-même. Tu lui as volé son innocence, il t’a volé ton âme.
Cette petite voix dans ma tête, elle revenait en boucle depuis que j’avais appris la tromperie de mon frère. Nous n’étions pas un couple, nous n’en avions jamais été un, en fait, entre nous, c’était plus fort que ça. Plus fort que tout c’qu’on peut voir dans ces films à l’eau de rose où le héros vient pleurer à la fenêtre de sa dulcinée qui lui tombe immanquablement dans les bras. Travis était une partie de moi, qui m’avait été arrachée par un homme que je haïssais du plus profond de mon être. Ma moitié, mon âme sœur, la seule personne qui trouvait grâce à mes yeux. Le seul pour qui je voulais avoir de l’importance. Il avait jeté son dévolu sur un autre, et je n’arrivais même pas à lui en vouloir. Parce que j’étais l’unique coupable de cette trahison. Je l’avais poussé dans les bras de Ronan en jouant toujours plus avec ses limites, j’avais voulu le posséder et voilà qu’il s’échappait de mon emprise pour voler de ses propres ailes. Mais j’étais incapable d’accepter ça. Je savais que s’il me laissait, je n’étais plus rien. Sa rébellion me fendait le cœur, si tant est que j’en ai eu un un jour.
Accoudé contre le rebord de la fenêtre, j’attendais qu’il m’achève pour pouvoir sauter sans me retourner. Sans regret, sans laisser qui que ce soit derrière moi. Qui serait là pour me pleurer si j’atterrissais quelques mètres plus bas en me brisant la nuque ? Ma mère serait soulagée de n’avoir plus un tel fardeau à assumer, mon frère serait enfin libre de vivre sa propre vie sans avoir de compte à rendre à personne. J’étais sa prison dorée et je voulais l’en libérer mais je n’étais pas sûr de survivre à son absence. J’avais besoin de le sentir dépendant de moi, comme si j’étais une drogue dont il ne pouvait se passer au risque de devenir fou. C’était ce qu’il représentait à mes yeux, même s’il n’avait aucun moyen de le savoir. Je le traitais comme un animal, mais j’avais toujours pensé que c’était ma façon à moi de l’aimer. Sauf que cette façon n’était pas une façon acceptable et je devais admettre qu’un autre avait réussi où j’avais échoué. L’idée même de le laisser aux mains de Ronan me tordait les tripes, je voulais être le seul à embrasser ses lèvres, à avoir un pouvoir certain sur son corps qui m’appartenait mais Travis m’avait finalement prouvé qu’il était mieux sans moi, que je n’étais qu’un bourreau qu’il essayait de fuir depuis des années sans jamais y parvenir.
Perdu dans mes pensées, je revins brutalement sur terre. Ses aveux étaient déchirants de sincérité, je ne pouvais pas douter de la souffrance que je lui avais infligée et il avait obtenu vengeance avec brio. J’étais pris au piège de ces grands yeux bruns qui me criaient combien je le dégoûtais, parce que c’était sans doute là le seul sentiment que je pouvais lui inspirer. « Quand est-c’que Ronan est devenu plus important que moi à tes yeux ? » J’avais pas réfléchi. Les mots s’étaient échappés d’entre mes lèvres sans qu’je ne puisse les retenir et je les regrettais amèrement. Pour la première fois depuis longtemps, j’agissais sans que tout ne soit parfaitement calculé, je ne mesurais pas l’impact des paroles que je prononçais. La douleur me rendait insouciant, stupide, au point que j’en oubliais mes propres règles. Jamais je n’avais voulu m’avouer la force des sentiments que j’éprouvais à l’égard de mon propre frère, peut-être parce que je trouvais ça parfaitement dégueulasse et immoral, ou peut-être par fierté. Mais à constater la facilité avec laquelle il faisait voler en éclat chacun de mes principes de vie, j’étais bien obligé d’avouer qu’il m’avait ôté toute capacité de penser par moi-même et personne d’autre que lui ne pouvait se vanter d’un tel exploit. Il était le seul à pouvoir m’atteindre, il en était parfaitement conscient et s’était servi de cette unique faiblesse pour me briser ; il s’était joué de moi et j’en affrontais les conséquences avec cet éternel sourire cynique qui donnait à mon visage un air de salaud blessé dans son égo. Je sautai de mon perchoir et rejoignis Travis d’un pas assuré, plus assuré en tout cas que ma voix presque tremblante. Je l’empoignai fermement par les épaules et l’obligeai à s’allonger pour m’installer sur lui, l’empêchant ainsi de fuir notre affrontement. Sauf que cette fois, je n’étais pas obsédé par l’idée de gagner. J’étais obsédé par lui, par lui que j’étais en train de perdre et qui préférait un autre à moi sans que je n’en comprenne la raison. Je savais que mon regard trahissait toute la peine qui m’étreignait mais j’essayais de me concentrer sur la colère que j’attisais volontairement en moi, et finalement, je lâchai prise. « Dis-moi quand. Est-c’que c’est quand il t’a fait l’amour ? Parce que moi aussi j’peux l’faire si c’est c’que tu veux. » Je parlais rarement aussi vite et mon frère ne m’avait sans doute jamais vu dans cet état. La nervosité faisait trembler chacun de mes membres et la violence des images que j’avais monté de toutes pièces en les imaginant se donner l’un à l’autre me donnait la nausée. Le monstre que j’étais venait de perdre la face et j’étais désormais sûr de ne pas sortir indemne de cette relation dangereusement addictive.
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Sujet: Re: « l’on hait avec excès lorsque l’on hait un frère. » Lun 26 Aoû - 1:23
J’étais assis sur le lit, massant les muscles endoloris de mes cuisses de mes doigts longs et fins. Mes mains avaient beau être gelées, j’avais travaillé trop longtemps debout pour éviter ce petit rituel habituel. J’observais en même temps Kiran qui était toujours assis sur le rebord de la fenêtre, appuyé contre le chambranle, le regard dans le vide. Il me tournait le dos et ne pas faire face à quelqu’un ne lui ressemblait guère. Généralement, quand il était remonté — ce qui était clairement le cas ici —, il s’arrangeait toujours pour avoir la meilleure position possible, celle qui impressionnerait son interlocuteur. Debout, telle une statue, son regard noir planté dans le mien; voilà comment j’avais imaginé notre explication. Mais ça n’était pas le cas. Il restait là, immobile, n’affrontant même pas mon regard en déblatérant ses piques. Je savais pertinemment qu’il souriait, ce sourire cynique et mesquin qu’il prenait un malin plaisir à arborer dans ce genre de situations. Néanmoins, moi aussi je souriais. Non pas par plaisir, mais par satisfaction. Satisfait de lui avoir fait subir au moins une fois ce que j’endurais depuis des mois, voire des années. Je ne me reconnaissais plus dans mon comportement; j’en venais à réagir comme lui, à me sentir puissant lorsque je le blessais. Ça n’était pas le genre de personne que je voulais être. Je ne voulais pas éprouver de la satisfaction à l’idée de blesser mon frère, mon double, ma vie. J’étais effrayé, certes, mais le sentiment de contentement ne disparaissait pas. Peut-être étais-je destiné à finir comme lui à force de l’avoir côtoyé pendant plus de vingt ans. Peut-être était-ce écrit. Ou peut-être étais-je tout simplement trop lâche pour tenter de prendre une direction différente de lui. Ou peut-être était-ce lui qui m’y emmenait.
Je ne savais plus quoi penser de Kiran. Il me débectait autant qu’il me fascinait. Un flot d’émotions m’envahissait quand je réfléchissais à notre relation. J’éprouvais d’abord pour lui un amour démesuré, une admiration qui me poussait à le suivre dans chacune de ses actions. J’éprouvais ensuite de la jalousie, provoquée par le fait qu’il réussissait tout ce qu’il entreprenait, qu’il arrivait toujours à obtenir ce qu’il voulait, alors que moi j’étais uniquement capable de me contenter de peu. Venait après la haine, une colère sans nom ressentie pour mon manque flagrant de volonté, inapte à réfléchir par moi-même et fonçant tête baissée dans tout ce que Kiran décidait. Enfin, c’était un désir brûlant qui s’insinuait en moi, à le contempler des heures, qu’il soit vêtu ou en tenue d’Adam, qu’il dorme ou qu’il soit sous la douche. Il était devenu mon obsession au moment où il avait décidé de mettre le grappin sur moi pour ne plus me lâcher. Il m’avait emprisonné entre ses griffes, assouvissant ses pulsions dominatrices en se faisant maître de ma vie. J’étais peut-être la parfaite illustration du syndrome de Stockholm. Il avait beau être une sorte de geôlier, il restait mon frère. Et j’en finissais par être fasciné par son mental d’acier et sa détermination à toute épreuve. Je l’avais érigé sur un piédestal, persuadé que je ne pourrais jamais lui tenir tête. À le considérer ainsi et à en faire un être exceptionnel, la passion qui naquit de notre relation et l’attirance que j’éprouvais à son égard étaient venues naturellement. C’était l’inéluctable issue.
Aujourd’hui plus que tout autre jour, je me sentais capable de lui tenir tête. Parce que je venais de me rendre compte que je savais exactement comment le blesser. Oh, non, je n’en étais pas heureux. Je me sentais même honteux de lui infliger une telle souffrance. Je ne voulais pas devenir un monstre. Je ne voulais pas devenir lui. Mais qu’avais-je comme possibilité ? Je ne pouvais pas le faire disparaître de ma vie. Et même mort, j’étais persuadé qu’il continuerait à me hanter. Je m’exaspérais moi-même, ne sachant aucunement sur quel pied danser, ne sachant pas distinguer mes propres émotions. Amour, haine, souffrance, satisfaction, jalousie, désir. Tout se bousculait bien trop vite dans ma tête. Et lorsqu’il rompit le nouveau silence qui s’était installé après mes réponses à ses attaques, j’avais choisi la haine. Ma relation avec Ronan ne te regarde en rien. Elle n’est absolument pas comparable à la nôtre. C’est totalement différent. Je laissai mon regard courir dans le vague. Et tu ne pourrais pas comprendre de toute façon… Tu es bien trop au-dessus des ressentis humains pour ça. J’avais le ton neutre, dépourvu tant de tact que de rancœur. Et sa réaction fut fulgurante. Il sauta de son perchoir, me rejoignant avec assurance pour se planter devant moi. Je levai instinctivement mon regard vers lui. Je plantai mes yeux bruns dans les siens alors qu’il m’empoignait sans douceur par les épaules pour me plaquer contre le matelas. Tous deux en boxers, lui torse nu et monté à califourchon sur moi, je sentis la chaleur prendre place dans mon corps et dans ma tête. Je déglutis doucement, prenant une inspiration censée me donner de la contenance. Sauf que ça n’était absolument pas le cas. Tout n’est pas une question de sexe, Kiran. T’es pathétique. sifflai-je entre mes dents. Je sentais ses mains qui resserraient la pression sur mes épaules. Mes mains fusèrent pour agripper ses hanches de chaque côté et je pouvais sentir sa peau fiévreuse sous mes doigts. Dans un excès de fougue, je le fis basculer sur le côté pour me retrouver cette fois à califourchon sur lui. T’oserais me faire l’affront de me prendre là, dans les mêmes draps où t’as baisé dix minutes plus tôt ? Tu me dégoûtes. Le comble, c’était d’éprouver du dégoût pour ça et non pour la relation incestueuse. Pour autant, mon regard défiait le sien, il lui crachait au visage toute la rancœur que j’éprouvais à son égard. Parfois j’me demande pourquoi on est jumeau tellement je diffère de toi. T’es qu’un putain de monstre sans cœur.
Dernière édition par Travis Deakin le Dim 8 Déc - 20:13, édité 1 fois
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Sujet: Re: « l’on hait avec excès lorsque l’on hait un frère. » Lun 26 Aoû - 8:00
J’étais anéanti. Ma tête me tournait dangereusement, j’étais attiré par le vide qui s’étendait sous mes pieds avec une irrépressible envie d’y plonger sans penser à rien d’autre qu’à ma douleur. Douleur que je voulais garder pour moi. Travis venait peut-être de me briser le cœur, mais il me prouvait ainsi que j’en avais un. Parce que j’en avais douté, à torturer chacune de mes victimes avec un plaisir sadique et malsain. Jamais je ne m’étais dit qu’j’allais trop loin, jamais je ne m’étais imposé la moindre limite et personne n’avait su le faire à ma place. Quand j’avais compris qu’il avait fait l’amour avec cet autre homme, j’avais eu tellement mal. Mal au point de vouloir en finir sans plus attendre. Mais quelque part, cette sensation d’être abandonné par ma moitié m’avait rassuré. J’avais trop longtemps cru que je n’étais qu’un psychopathe incapable de ressentir d’autre émotion que la satisfaction de contrôler ma vie. Et à force, tout le monde avait fini par s’en persuader. Même lui. Sauf qu’il avait beau dire que j’étais un monstre, maintenant je savais qu’il mentait. Dans un élan de désespoir, je m’étais installé sur ses cuisses et lui avait posé la question qui brûlait mes lèvres en même temps que je prononçais ces mots. Et sa réponse ne se fit pas attendre. Sèche, sans appel. La sentence était tombée. Je n’étais pas à la hauteur. Il m’avait remplacé. Il m’avait remplacé parce que je n’avais pas su lui accorder l’attention qu’il méritait. Ou, si je l’avais fait, je ne m’y étais pas pris correctement. J’avais ma façon bien à moi de lui montrer que j’l’aimais, mais ça ne lui convenait pas. Et comme pour donner plus de poids à ses paroles qui signifiaient pour moi la fin de notre relation si spéciale, il renversa la situation et prit place au-dessus de moi. Ainsi, j’avais tout le loisir d’observer son torse nu, ses muscles qui dénotaient avec la fragilité que je lui connaissais. J’étais troublé, oppressé par l’impression d’être dominé comme je ne l’avais jamais été. J’avais chaud, trop chaud, j’étouffais dans une atmosphère pesante et désagréable, j’étais désarmé face aux quatre vérités qu’il me balançait sans détour.
Travis semblait persuadé de valoir mieux que moi. Parce qu’il osait enfin me tenir tête. Mais il avait tort. Et cette constatation m’emplissait d’un sentiment de fierté indéfinissable. « Tu t’trompes Travis. On a beaucoup plus de choses en commun que c’que tu n’veux bien croire. » Je venais seulement de m’en rendre compte. La position qu’il avait prise m’aidait à comprendre l’évidence, celle qui aurait dû me sauter aux yeux. J’avais du mal à accepter qu’il se trouve au-dessus de moi à admirer son travail ; d’ordinaire, j’étais celui qui m’installait au-dessus de lui en toutes circonstances mais pour l’heure, je préférais garder ma place, songeant que cela lui permettrait de réaliser les choses tout comme je venais de le faire. Pendant longtemps, j’avais essayé de le pousser à agir sans considération pour autrui, j’avais voulu le façonner à mon image mais n’avais réussi qu’à l’enfermer dans une prison dorée dans laquelle il semblait se complaire. Jusqu’à ce jour. Il avait décidé de se rebeller et j’étais devenue sa proie. « Ca t’fait quoi hein ? Ca t’fait quoi d’avoir réussi à m’faire mal ? T’es satisfait, pas vrai ? Regarde-toi ! T’es fier de c’que t’as fait ! » Malgré moi, je riais. Je riais aux éclats, parce que quelque part, j’avais eu exactement ce que j’voulais. Il me détestait viscéralement, et pourtant son comportement était exactement celui que j’aurais adopté dans une telle situation. Au fond, même s’il refusait de l’admettre, il devenait aussi mesquin et cruel que je pouvais l’être. Sauf que pour lui, ce n’était pas naturel. Il se forçait à me faire mal pour s’empêcher de se soumettre une nouvelle fois à mon autorité, son besoin de liberté le poussait à se conduire comme le véritable salaud que j’étais. En réalisant cela, je prenais conscience qu’il n’avait jamais arrêté de n’être que mon reflet, une ombre fade qui essayait de prendre son envol et qui suivait le chemin sur lequel j’avais essayé de l’entraîner durant des années. Irrémédiablement attiré par cette facette de sa personnalité que je découvrais peu à peu, je portais ma main jusqu’à sa joue et effleurait sa peau avec une douceur sans précédent. « T’es à moi mon ange. Et t’as pas l’droit de dire le contraire, parce que j’t’appartiens aussi. » Mon pouce retraçait le contour de ses lèvres que je me plaisais à contempler silencieusement. Pour la première fois depuis longtemps, je le regardais. Je n’me contentais pas de le toiser froidement, non, je détaillais les traits de son visage qui ressemblait étrangement au mien, mais lui avait quelque-chose en plus. Dans ses yeux pétillait une étincelle de vie qui lui donnait cet air enfantin et innocent ; et moi je cherchais à l’éteindre parce que je ne supportais pas qu’il puisse s’intéresser à quoi que ce soit d’autre qu’à ma personne. J’en oubliais presque de respirer tant il me rendait faible et vulnérable mais je n’avais pas l’intention de le laisser gagner. Il devait seulement comprendre ce que je ressentais lorsque je le savais à ma merci, et pour ça, il avait besoin de croire qu’il pouvait me dominer pour une fois. Mais sitôt que j’aurais obtenu de lui ce que je désirais, je reprendrai le contrôle de nos deux vies sans plus jamais lui offrir l’occasion de me détruire.
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Sujet: Re: « l’on hait avec excès lorsque l’on hait un frère. » Mar 27 Aoû - 20:57
La scène s’était passée rapidement. Kiran m’avait pratiquement sauté dessus pour me plaquer contre le matelas en maintenant une pression sur mes épaules à l’aide ses mains. Il me déversait sa haine au visage, plongeant son regard noir dans le mien. Pour autant, je ne réagissais pas tout de suite, attendant qu’il ait fini de cracher son venin. Ma réaction fut telle ensuite que j’en fus moi-même impressionné. Je ne me pensais pas capable d’une telle vivacité pour renverser la situation. J’avais basculé Kiran sur le côté avec une force que je ne me connaissais pas. À califourchon sur lui, c’était moi qui prenais les choses en mains. Je refusais d’être à nouveau menacé par mon frère. Je refusais de le laisser avoir un nouveau contrôle sur ma vie. Il en avait trop pris l’habitude, c’était quelque chose que je voulais changer. Depuis toujours, Kiran avait été celui qui faisait marcher le duo. Même si tous pensaient que c’était moi qui avais le caractère fort, tout n’était qu’une façade. Une façade mise en place par mon double en personne. Il se sentait puissant dans l’ombre, tel un marionnettiste, prévoyant méthodiquement chacune de mes actions. J’étais parfois même inconscient de sa force de persuasion et de ses manigances si bien ficelées. Pour autant, Kiran semblait si persuadé d’avoir plus en commun que ce que je ne voulais admettre. Pire encore, il me considérait comme son double. On avait beau être jumeau, on avait beau avoir une petite ressemblance physique, je m’étais toujours estimé loin de lui mentalement parlant. Je ne lui trouvais rien de semblable à moi. J’étais tout son contraire. Ou du moins jusqu’à maintenant. J’avais l’impression que plus on évoluait, plus on avançait dans le temps, et plus je me rapprochais de lui. Il déteignait sur moi comme un linge de couleur déteint sur un linge blanc. Je me sentais tâché, souillé par sa méchanceté et sa mesquinerie. J’étais effrayé à l’idée que ses obsessions de supériorité deviennent les miennes. Ce que je venais de faire à ce moment précis, en renversant la situation pour monter sur lui, c’était peut-être quelque chose qu’il espérait. Parce que Kiran prévoyait tout. Il était omniprésent, omnipensant.
Je posai alors mon regard sur mes mains. Elles tenaient fermement ses épaules contre le matelas. Mes yeux bifurquèrent sur la mine au sourire mesquin de Kiran. Il semblait satisfait. Il jubilait intérieurement de ce que je venais de faire. Il jubilait de me voir me révolter, de me voir me dévoiler. Je dévoilais ainsi mon envie d’indépendance, mon besoin d’amour. Quelque chose qu’il tâcherait de me retirer dès qu’il en aurait l’occasion. J’en étais intimement persuadé; il ferait subir à Ronan un châtiment des plus atroces. Parce qu’il voulait être le seul. Il voulait être celui qui me procurerait l’amour dont j’avais besoin. Sauf que Kiran était totalement incapable de me procurer ce que j’attendais. Ce que je voulais, ça n’était pas sa jalousie maladive. Ça n’était pas son oppression constante. Cette forme d’amour, ça n’était pas mon souhait. Kiran n’avait pas la capacité d’aimer autrement. Quelque chose avait dû se passer à la conception pour qu’il soit ainsi. Une personne normalement constituée ne pouvait agir comme il le faisait. C’était totalement inhumain. Je savais pourtant qu’il tenait à moi tout comme je tenais à lui. Un éternel questionnement qui me rendait parfois dingue au point de vouloir m’en arracher les cheveux. Il ne se passait plus une journée sans que Kiran ne me sonde, ne tente de savoir à quoi je pense. Depuis ma «trahison», comme il se plaisait à le dire, avec Ronan, il avait redoublé de vigilance à mon égard. Aujourd’hui, il avait exécuté son plan avec brio.
Je déglutis doucement, relâchant lentement la pression que j’exerçais de mes mains sur les épaules de mon frère. En me rendant compte de ma réaction, de la portée de mon geste, je lâchai prise. C’était impensable que je me mette à penser et à agir comme lui. J’suis pas un monstre. J’suis pas comme toi. Tu mens ! me défendis-je tant bien que mal, touché en plein cœur par sa remarque criante de vérité. Oui, on avait finalement une foule de points communs lui et moi. Il m’avait tellement poussé à agir comme lui, à n’avoir aucune considération pour les autres, à observer autrui comme des proies. Mais tout ça n’avait fait que m’éloigner de lui. Me pousser dans mes retranchements m’avait fait me renfermer sur moi-même. J’étais spectateur de ma chute, laissant la morosité et la routine prendre le pas sur ma vie. Quelque chose que je n’aurai jamais laissé passer avant qu’on ne dérape, avant qu’on ne s’embrasse. C’est ton putain de jeu stupide qui nous a amené là, pas moi. Ce con se mettait à rire, amusé par la situation. Mon regard se perdit rapidement sur ses lèvres, mes yeux descendant doucement le long de sa mâchoire jusqu’à son cou, puis son torse. Je détaillai chacune de ses courbures. J’suis pas satisfait du tout. J’ai aucune envie d’agir comme toi… Je fermai les yeux un instant, soupirant de fatigue. J’étais épuisé par tout ça. Pourquoi je me tuais à essayer de comprendre ? Rien n’était compréhensible avec ce taré. J’devrais le laisser agir seul sans m’en soucier un seul instant. Et alors que je m’apprêtais à basculer sur le côté, il me surprit avec un geste qu’il n’avait jamais eu. Sa main se posa avec une délicatesse que je ne lui connaissais pas sur ma joue, son pouce dessinant le pourtour de mes lèvres. J’en restai abasourdi, immobile, n’osant plus bouger d’un millimètre. Mon souffle s’accéléra, ma bouche tremblait sous ses gestes. Kiran, arrête ça… murmurai-je sans conviction, lui offrant sans réellement m’en rendre compte un baiser sur son pouce en parlant. Mon bassin s’enfonça un peu plus sur lui, plaquant mes mains sur son torse. Je rouvris les yeux lentement, laissant mon regard plonger dans le sien. Ses yeux bleus-gris me faisaient perdre pied. Je ne répondais plus de moi-même. Il avait pas le droit de jouer avec moi comme ça. Je ne contrôlais rien, il avait la main mise sur moi et il savait pertinemment comment me faire tomber. Des pensées immorales me traversèrent l’esprit et, finalement, dans un élan de courage, je me laissai tomber sur le côté, m’allongeant près de lui, le visage rivé vers le plafond. Je posai mon avant-bras droit sur mon front, tâchant de reprendre mes esprits. Arrête de faire ça… Arrête de me dire ça. Je sais que tu ne le penses pas…
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Sujet: Re: « l’on hait avec excès lorsque l’on hait un frère. » Mer 28 Aoû - 16:34
Travis avait craqué. Il m’avait empoigné par les hanches et s’était installé sur mes cuisses pour me prouver qu’il était lui aussi capable de penser par lui-même, il se révoltait, se rebellait contre la vie que je lui imposais depuis toujours. Tapi dans l’ombre, je me plaisais à anticiper la moindre de ses réactions, je prévoyais tout jusqu’aux mots qu’il emploierait, à la lueur qui traverserait son regard à tel ou tel moment. Je l’avais observé assez longtemps pour me vanter de le connaître par cœur, j’avais appris chacun de ses sourires, de ses soupirs, et je m’enivrais de cet avantage en constatant tout ce que ça pouvait m’apporter. Il était beau mon Travis, à croire qu’il pouvait me dominer pour une fois. Il était beau, à me tenir tête en étant persuadé qu’il se libérait enfin des chaînes qui l’empêchaient de vivre sa vie. Il était beau mon Travis. « Si j’mens, pourquoi tu réagis comme ça ? » Il était révulsé par l’idée même d’être apparenté à moi, à mon manque d’humanité chronique. Et moi ça m’amusait plus que de raison, j’en riais aux éclats tant que ça l’insupportait. Il avait atteint ses limites, enfin. Et il réalisait finalement que j’étais à l’origine de son comportement révolté et nouvellement instable, mais se rendre compte qu’il n’était qu’un pantin dont je tirais les ficelles le rendait fou. « Pourtant t’étais fier quand tu m’as dit que j’t’empêcherai pas d’le revoir. T’étais fier de voir que t’avais réussi à m’atteindre, ça t’a plu de me faire comprendre que j’étais plus l’seul. » Il avait beau se défendre vivement, il ne pouvait pas nier ce qui me paraissait désormais si flagrant. Travis avait toujours tout fait pour ne pas me ressembler, pour ne pas suivre le chemin sur lequel je le poussais jour après jour, il avait fini par céder à la tentation trop forte du pouvoir. Pour arriver à mes fins, j’avais dû souffrir, j’avais dû le savoir avec un autre mais au fond, toute cette douleur était utile et je jubilais fièrement devant lui en comprenant que j’avais gagné. Et alors que j’observais d’un air satisfait ma victoire sur son visage défait, je laissai glisser une main innocente sur sa joue. Il se raidit presque aussitôt, sans doute troublé par un geste totalement désintéressé de ma part.
Doucement, mon pouce dessinait les contours de ses lèvres et je le sentais fondre sous mes caresses, il me suppliait d’arrêter, je jouissais intérieurement d’un contrôle absolu sur mon jumeau. Soudain, il s’enfonça un peu plus sur mon bassin et une chaleur oppressante s’empara alors de mon bas-ventre, mais je m’efforçais d’oublier le désir naissant dont l’unique objet se trouvait au-dessus de moi, à s’inquiéter de l’influence que j’avais sur lui. Mais comme toujours, il préférait fuir. Fuir l’amour interdit qu’on se portait, fuir l’envie et la tentation que je représentais pour lui. Sauf que j’étais pas décidé à le laisser s’en tirer comme ça, et je vins aussitôt m’installer entre ses jambes en attrapant ses poignets d’une main pour les coincer au-dessus de sa tête. J’avais pas besoin de forcer, je savais qu’il ne m’échapperait pas. « J’ai pas envie d’te laisser partir. Tu fais partie de moi, tu comprends ça ? » Je plantai un regard dur et sévère dans le sien, me perdant dans l’abysse de ses yeux chaleureux qui me redonnaient un semblant de vie. « Je suis un monstre, mais tu m’aimes pas vrai ? » Mes lèvres s’étirèrent en un fin sourire peu assuré ; au fond, je connaissais déjà ses sentiments envers moi mais il passait plus de temps à me reprocher mon manque de compassion et mon évident syndrome de psychopathie plutôt qu’à me prouver son amour, et j’commençais à en avoir marre. J’avais besoin qu’il me le dise, qu’il prononce ces mots à voix haute parce que même si j’étais incapable de douter de ce qu’il éprouvait, il devait se souvenir de la raison qui l’avait poussé à me suivre lorsqu’on avait entamé cette séance de jeu plus dangereuse que les précédentes. J’me souvenais de ce jour-là, j’en avais encore des frissons à y repenser. Au début, j’avais pas compris. J’pensais qu’il plaisantait, qu’il se foutait de ma gueule. Et pourtant il avait jamais été aussi sérieux. Et malgré moi, j’avais pris goût à cette relation malsaine, ambigüe et détestable qu’était la nôtre. Son souffle chaud qui s’était mêlé au mien pendant une fraction de seconde avait suffi à me rendre accro, et depuis je n’avais de cesse d’espérer qu’il s’offre à moi, qu’il se soumette à mon entière volonté le temps d’une nuit. « Laisse-moi t’embrasser. » La voix doucereuse dont j’usais pour le séduire ne me ressemblait pas, mais j’avais compris qu’à me voir si vulnérable, il s’était senti puissant et c’était exactement ce dont il avait besoin. Mon corps épousait parfaitement le sien, comme si dans notre ADN, il était écrit que nous finirions par être ensemble de la plus délicieuse des manières. Du bout des doigts, je parcourais sa gorge, et mes yeux s’ancraient dans les siens qui pétillaient d’une étincelle de vie ; cette même étincelle que j’avais essayé d’éteindre mais qui s’accrochait à lui désespérément malgré toutes mes tentatives pour le rendre aussi froid et insensible que je l’étais. J’avais l’impression que sa peau brûlait sous mes mains, celles-ci embrassaient son visage que je me plaisais à détailler comme si je le découvrais pour la première fois. Mon double, ma moitié, je pouvais sentir le sang pulser dans ses artères tandis que j’effleurais ses lèvres avec une lenteur exaspérante.
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Sujet: Re: « l’on hait avec excès lorsque l’on hait un frère. » Dim 15 Sep - 21:46
J’avais été con de penser que j’étais celui qui menait la danse pour une fois. C’était idiot de ma part d’avoir eu un tel espoir. Je m’étais senti fier, fort et déterminé. Kiran avait tôt fait de détruire tout ça en un claquement de doigts. Mon comportement révolté, exigeant sans relâche ma libération, c’est ce qu’il avait prévu. Dans les moindres détails. Comme d’habitude. J’étais son jouet, son pantin, qu’il s’amusait à manipuler avec des ficelles. Plus les années passaient, plus Kiran redoublait d’effort pour me faire perdre pied. J’avais beau avoir toujours voulu me lever contre lui, voilà que j’en doutais atrocement. Si c’était ce qu’il voulait, devais-je lui donner encore raison ? Non ! C’était hors de question. Je m’étais toujours évertué à lui faire plaisir. Pour une fois, j’devais faire ce qu’il ne voulait pas. Mais moi-même je ne savais plus ce que je souhaitais ni ce que lui désirait. Il avait réussi à semer le doute dans mon esprit, à tel point que réfléchir ainsi me donnait un mal de crâne désagréable. Trop de questions, trop d’hypothèses, trop de réponses incertaines. Alors je me laissai aller, je me laissais perdre pied. Parce que je n’avais su faire que ça depuis le début. Peut-être étais-je fait pour ne faire que ça jusqu’à ma mort… Être le pantin de Kiran. Au fond, je préférais ça à devenir aussi cruel que lui. À force d’avoir voulu me battre vainement contre mon frère, voilà que j’empruntai la même voie que lui; impulsivité, rage, fierté, domination. Je ne voulais pas. Je ne voulais pas devenir un monstre.
Mais si je ne devenais pas un monstre, qu’allais-je être ? J’avais beau fuir, il revenait constamment. Je basculai sur le côté pour m’étaler sur le dos, me rabaissant une nouvelle fois à ne pas lui tenir tête. Il s’empressa aussitôt pour reprendre la place qui lui était due. Il s’inséra entre mes cuisses, emprisonnant mes frêles poignets dans une de ses mains expertes pour les coincer au-dessus de ma tête. Je ne résistai pas, ça n’aurait aucun intérêt. Il aurait tôt fait de reprendre le dessus par la force. Son regard aussi dur et froid que l’acier se planta dans le mien, que je voulais plus chaleureux, et un désir naissant se mit alors à courir à travers mon corps pour faire vibrer chacune de mes cellules. Je tremblais d’amour pour cet Apollon fielleux qui représentait tout ce que je n’avais pas réussi à être; un jeune homme ambitieux, déterminé, sachant contrôler ses émotions, ayant une totale emprise sur sa vie et parfois sur celle des autres. Cet Apollon qui s’avérait être mon frère jumeau. Peut-être l’aimais-je aussi pour cela. Car il était le seul garçon qui pourrait me faire cet effet. La bestialité que je lui connaissais me redonnait presque vie. La complicité de notre relation faisait chasser ma morosité constante. L’amour qu’il me portait à sa manière me rassurait sur ses intentions à mon égard. J’avais beau lui en vouloir de toutes mes forces, je savais qu’il me voulait pour lui parce que j’étais son frère. Si je n’avais pas été son jumeau, peut-être n’aurait-il même pas daigné me regarder. Et aussi répugnant que ça puisse paraître, l’idée-même qu’il me touche me procurait un sentiment d’exaltation. L’excitation de l’inconnu, la peur de la faute morale, l’ivresse de l’âme.
Ses lèvres s’étirèrent bientôt en un sourire que je ne lui connaissais pas; il n’était pas aussi assuré que d’habitude. Tout dans ses gestes aujourd’hui laissait à penser que Kiran perdait pied. Mais à chaque fois que j’avais eu cette pensée au cours de cette fin d’après-midi, il avait rapidement chassé mes doutes en reprenant le dessus. J’étais persuadé au fond de moi que le monstre en lui perdait peu à peu de sa vigueur en me voyant glisser entre ses doigts. Pour remédier à ce problème, il savait qu’il devait jouer la carte de la tendresse avec moi. Mais je ne voulais pas. Lui céder résumerait à me passer à nouveau des chaines aux poignets et aux pieds. Lui résister signerait certainement la mort de Ronan mais signifierait aussi que Kiran s’évertuerait davantage à me pourrir la vie et à me tenter jusqu’à ce que je finisse par craquer. J’étais coincé. Coincé entre deux feux. Ce grand brasier de l’amour et du risque dans lequel j’avais envie de plonger me paraissait être la meilleure option. De l’autre côté, je voyais un gouffre obscur où il m’était impossible de distinguer le fond. Une chute qui risquerait de me coûter la vie. Je me repris à me poser des dizaines de questions et cette pensée m’arracha un ronchonnement.
Mon regard de braise accrocha celui de Kiran. Il était plus doux, sa voix s’était presque faite mielleuse et je percevais dans ses gestes une délicatesse rare. Et à cet instant précis, je décidai de ne plus réfléchir. Je mis momentanément mon cerveau sur pause et je me contentai de le contempler. Ses doigts courraient sur mon torse pour s’arrêter quelques instants à la naissance de ma gorge. S’il le voulait, il pourrait m’étrangler et ôter cette lueur de vie qu’il répugnait tant dans mon regard. Cette lueur qui lui rappelait certainement que je n’étais pas comme lui, que nous étions différents. Et ça, c’était quelque chose qui le mettait hors de lui. Mais pour l’heure, il se contenta de m’effleurer. De parcourir avec attention ma peau fiévreuse de désir. Ma bouche entrouverte laissait échapper une respiration haletante qui trahissait très certainement mon envie. Bientôt, ses doigts vinrent caresser la courbure de mes lèvres et mes yeux papillonnèrent encore une fois quelques instants. Faisons-le. lâchai-je subitement au moment où mes mains agrippèrent ses hanches avec une vigueur dont je n’avais jamais fait preuve. Elles percevaient elles aussi la chaleur de sa peau. Alors je le repoussai sur le côté, me libérant pour ôter le dernier rempart qui m’empêchait de laisser nos corps s’épouser parfaitement. Une fois retiré, je jetai mon jean à travers la pièce sans réellement savoir où il atterrirait. Je repris ma position initiale, allongé sur le dos, et mes mains agrippèrent de nouveau son corps pour l’amener sur moi, à califourchon. Mes mains se promenèrent sur les côtés de son torse avant de tenir fermement ses hanches, comme je l’avais fait quelques secondes auparavant. Une pression que je maintenais volontairement, à la fois pour lui montrer tout le désir que j’éprouvais à son égard et pour lui faire comprendre que je n’avais pas fini de lui tenir tête. Qu’il avait peut-être gagné une bataille mais certainement pas la guerre.
Ainsi installés, je sentais aisément le sang affluer lentement tant vers son intimité que vers la mienne. La pression que je maintenais sur ses hanches l’obligeait à s’appuyer un peu plus contre moi; je voulais qu’il sente à quel point je le désirais, à quel point je désirais lui faire l’amour. Et avec vivacité, je me redressai, mes mains rejoignant son dos pour le cambrer un peu et couvrir son torse de lents et humides baisers. Une de mes mains agrippa ses cheveux sans délicatesse et, tout en me laissant retomber lourdement sur le matelas, l’entraînant avec moi, mes lèvres vinrent capturer les siennes dans un baiser des plus passionnés.
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Sujet: Re: « l’on hait avec excès lorsque l’on hait un frère. » Ven 27 Sep - 20:06
Il avait cru pouvoir dominer et il avait adoré ça. J’avais lu dans son regard une étincelle perverse, presque malsaine, celle qui brillait sans doute dans le mien d’ailleurs. Il avait voulu prendre ma place, rien qu’une fois, voir ce que ça faisait que d’être le grand méchant de l’histoire, le sadique, le connard. J’l’avais laissé faire, c’était bon de constater que lui aussi y prenait un plaisir certain. Au fond, si les rôles avaient été inversé, sans doute qu’il aurait réagi exactement comme moi. Après tout, nous étions jumeaux, nous avions les mêmes gênes, le même sang, et j’étais presque sûr qu’il n’aurait pas hésité à m’écraser sans le moindre remord s’il en avait eu la force. La nature humaine était ainsi faite, les faibles s’agenouillaient devant les plus forts et moi, j’étais né du bon côté de la partie. Travis n’avait pas eu de chance, j’le concevais assez facilement et je savais que j’étais dur avec lui mais c’était dans ma nature, et parce que j’avais hérité du caractère le plus imposant, je me devais de faire la loi et de mener la danse ; lui n’avait pas les épaules pour prendre des initiatives ou des décisions importantes si bien que je m’obligeais parfois à le faire même si je m’amusais toujours autant à le voir se débattre avec ses cas de conscience. On était tous les deux sérieusement dérangés mais la différence entre lui et moi, c’était que moi je ne le niais pas. Lui refusait d’être différent, il n’acceptait pas l’idée même qu’on puisse se ressembler mais il était mon double et tout dans sa façon d’être me prouvait que j’avais raison. Par moment, il s’autorisait à franchir les nombreuses limites qui l’empêchaient de s’ouvrir et on se retrouvait dans des situations au-delà de la morale, comme cette séance de jeu qui avait tourné d’une manière bien particulière. Ce jour-là, j’avais compris que même s’il s’évertuait à prétendre le contraire, il était incapable de combattre l’influence néfaste que j’exerçais sur son être tout entier. Je contrôlais de ses sourires jusqu’à ses pleurs, en passant par ses soupirs exquis lorsque mes doigts venaient effleurer sa peau frémissante et la peur qui accélérait douloureusement son rythme cardiaque quand je devenais un peu trop brutal à son goût.
Pourtant, et de ça il ne s’en rendait probablement pas compte, j’étais terrorisé. Avec le temps, le rôle que je jouais dans sa vie, dans son éducation, dans son comportement s’était accentué et plus les mois passaient et plus je voyais comme je l’entraînais vers le fond. En soit, l’idée ne me dérangeait pas ; il me rejoignait dans ma folie et j’étais presque rassuré de le savoir à mes côtés quand je commençais à sombrer. Mais je savais aussi qu’au moindre faux pas, je pouvais le briser et faire de lui une véritable marionnette dont je tirerais les ficelles, un jouet avec lequel je m’amuserais un moment avant de le jeter froidement comme je le faisais toujours. Je ne pouvais pas me lasser de sa présence, cependant il restait une infime part de moi qui s’inquiétait de ce qu’il allait devenir et qui espérait le voir s’éloigner, le voir échapper à mon emprise machiavélique. S’il m’abandonnait, j’en mourrais. Mais s’il ne le faisait pas, s’il restait à mes côtés et qu’on continuait sur cette pente glissante, je le perdrais aussi, d’une façon bien différente toutefois. En réalité, j’aimais lorsqu’il se défendait, lorsqu’il tentait vainement de me tenir tête. J’aimais le défi qu’il représentait à mes yeux, j’aimais la hargne et le dégoût profond qu’il éprouvait pour ma personne parce que ça le rendait plus difficile à atteindre. Et en même temps, il était comme de l’eau qu’on essaie de retenir entre ses mains, espérant qu’elle y reste emprisonnée pour toujours mais elle finissait toujours par trouver cette faille en vous, cette petite porte qui lui permettait de s’enfuir. La porte de Travis, c’était Ronan. Et je ne pouvais pas le laisser m’ôter la seule chose qui me gardait encore en vie. Je ne savais pas encore comment je m’y prendrais mais j’étais sûr de mon objectif : je devais l’empêcher de me nuire, de nous nuire. Et j’y arriverais par n’importe quel moyen, parce qu’il était simplement hors de question que je perde contre cet Apollon qui se prétendait bon pour lui. Meilleur que moi. Comme si c’était possible.
Au-dessus de lui, je goûtais à la saveur délectable du pouvoir absolu, de la maîtrise, de l’autorité suprême. C’était bon, trop bon, au point que j’en oubliais presque de respirer tant il était beau à se laisser faire complètement, à s’offrir à mes mains sans opposer la moindre résistance. Il semblait même apprécier l’instant, je pouvais le sentir s’agiter sous mes hanches mais jamais je n’aurais imaginé qu’il m’assène ces mots d’une façon aussi dure, aussi insensible et froide. J’étais soufflé par le ton de sa voix, si bien que j’me laissai tomber sur le lit sans rien dire et le regardai se déshabiller. Lorsqu’il eût ôté son jean, il m’attrapa brusquement par les hanches et je reprenais ma place mais je n’étais plus le même. Il m’avait pris par surprise et j’étais complètement sonné, comme si j’avais pris un coup sur le crâne. Incapable de réfléchir correctement, de réagir aussi. Mon corps en revanche parlait pour moi et me criait que je le désirais comme j’l’avais jamais désiré. J’avais envie de mon frère, de lui faire l’amour, et pas de le baiser comme toutes ces chiennes qui étaient passées dans mes draps. C’était plus fort que moi, ça m’bouffait de l’intérieur mais je n’arrivais pas à comprendre ce qui le motivait à passer outre les barrières qu’on s’était imposées tacitement. Aussi, quand il se redressa pour m’embrasser avec une ferveur et une passion que je ne lui connaissais pas, je ne répondis que vaguement à son baiser. La poupée de chiffon que j’étais devenue semblait avoir perdu toute force physique au point que je n’étais pas sûr de pouvoir réaliser notre fantasme aussi dégueulasse qu’attirant. Il m’avait perdu en cours de route, et désormais j’essayais de lire en lui mais je n’étais pas sûr de savoir ce que j’étais supposé comprendre. C’est en me plongeant dans ses yeux noisettes que la vérité me frappa comme une claque en pleine tronche. Violemment. Il jouait. Encore. Comme on l’avait fait quelques semaines plus tôt, comme quand on s’était embrassés pour la première fois, ce n’était là qu’un jeu destiné à me prouver qu’il pouvait aller toujours plus loin dans le vice que représentait notre relation. Et ça ne me convenait pas. Les choses ne devaient pas se passer comme ça. En un sens, j’étais presque fier de le voir devenir aussi barge que moi, mais je l’aimais trop pour accepter qu’il me traite comme j’le faisais avec lui. Je n’étais pas une de ces expériences un peu trop aventureuses, je n’étais pas non plus son challenge du jour. Je voulais devenir tout pour lui. « Est-c’que c’est un jeu ? » murmurai-je contre ses lèvres tandis que l’une de mes mains s’accrochait à ses cheveux bouclés. Je ne pouvais finalement m’en prendre qu’à moi-même, car je l’avais attiré justement avec ce goût du danger, du défi à relever et il en était devenu accro mais cette fois, et ce même si je voulais le voir s’abandonner dans mes bras et me laisser prendre l’entière possession de son être, je ne me sentais pas à la hauteur. J’aurais pu le sauter comme n’importe qui d’autre, le baiser brutalement et le laisser tomber, ça je savais faire. Mais si j’en venais à une telle sauvagerie avec lui, si je m’autorisais à lui faire subir ce que je faisais à mes conquêtes, j’étais sûr de le perdre pour de bon. Parce qu’il méritait mieux que ça, mieux que moi sûrement. A bien y réfléchir, j’étais pas prêt à lui donner ce qu’il voulait. Ca signifiait aussi baisser ma garde, et je pouvais pas me le permettre. A le voir reprendre des forces comme ça, j’prenais conscience qu’il avait lui aussi une emprise certaine sur moi, mais j’le laisserais jamais gagner. Alors je me contentais de m’exécuter, comme il l’avait demandé. Sans attendre de réponse de sa part, je m’enfonçai un peu plus sur lui et mes lèvres glissèrent sur sa gorge pour l’y mordre sans ménagement, j’apposai ma marque sur son corps pour signifier qu’il était mien. Et pendant ce temps, mes mains impatientes allaient se perdre sous son boxer que je faisais délicieusement claquer contre sa peau et dont je décidai de le défaire. Lorsqu’il fut entièrement nu devant moi, à ma merci sans personne pour le sauver de mes griffes, je le toisai d’un regard sans tendresse, sans amour, un regard bestial et dur. « Alors jouons. » Et je le plaquai sur le lit pour m’emparer de sa bouche et ainsi ne pas lui laisser le temps de riposter.
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Sujet: Re: « l’on hait avec excès lorsque l’on hait un frère. » Sam 28 Sep - 21:31
Je me laissai littéralement emporter par ma passion. Une passion dévorante que j’avais nourrie à son égard depuis maintenant une dizaine d’années. Kiran avait toujours été un de mes idéaux masculins, le garçon que j’aurai aimé séduire s’il n’avait pas été mon frère. Même si je m’étais rendu compte très rapidement de son comportement plus que dérangeant et de sa pathologie à vouloir tout contrôler, il continuait à me faire de l’effet et le moindre geste à mon égard me faisait perdre pied. Pire encore, je me sentais prisonnier de ce désir dès qu’il se trouvait dans la même pièce que moi. Alors j’avais renoncé à vouloir le conquérir. Au contraire, je l’avais laissé gérer les choses. Je l’avais laissé avoir cette emprise sur moi, je l’avais laissé gagner du terrain pour me soumettre dès qu’il en avait l’occasion. Je n’avais pas voulu résister; non seulement parce qu’il était mon frère, mais aussi parce que j’éprouvais pour lui un amour immoral bien plus que fraternel. Je n’avais pas voulu le reconnaître jusqu’à présent, mais c’était quelque chose dont j’étais sûr maintenant que je l’embrassais langoureusement. Mon frère, je l’avais toujours aimé bien plus que n’importe qui d’autre, bien plus que ma propre mère, bien plus que Kiran en personne — et Dieu sait à quel point il s’aimait lui-même. En cet instant, lorsque j’eus décidé de ne plus réfléchir à rien, je n’avais pas imaginé une seule seconde que Kiran puisse de nouveau tout gâcher. En m’offrant à lui de la sorte, j’avais cru pouvoir lui faire comprendre que je lui appartiendrai toujours, que malgré mes réticences et mes pensées paradoxales, les sentiments si forts que j’éprouvais pour lui prenaient constamment le dessus. Je m’étais encore une fois fourvoyé, car Kiran n’avait pas compris le message. Pire même, j’avais sûrement réveillé en lui la bête que j’avais passé tant de temps à combattre. Cette bête ignoble qui manquait cruellement de tendresse et d’intérêt pour quiconque. Mais ça, je ne le savais pas encore.
Alors qu’il était assis sur moi, je m’étais redressé pour le cambrer tandis que mes mains caressaient la peau de son dos à mesure que je couvrais son torse de baisers mouillés et sensuels. Je m’étais enivré de son odeur, fermant les yeux pour percevoir davantage toutes les sensations qui passaient à travers mon corps. Je n’avais envie que d’une chose, c’était de pouvoir jouir de concert avec mon frère, de ne faire qu’un avec lui le temps d’une nuit. Je m’étais laissé retomber sur le matelas, l’entraînant dans ma chute pour happer ses lèvres avec une passion dévorante. Et c’est à ce moment que je perçus son hésitation. Pire encore, il semblait complètement insensible. Sur le moment, je n’avais pas voulu me rendre réellement compte de sa réaction. J’avais continué de l’embrasser et de caresser ce corps presque nu sur moi. Ses vagues — pour ne pas dire inexistantes — réponses à mes baisers tranchaient avec l’excitation que son corps me témoignait. Je percevais aisément son érection à travers son boxer, et c’est la raison pour laquelle je me sentais totalement perdu. À mesure que la scène se déroulait, je me fis de moins en moins tactile, de plus en plus hésitant. Mes muscles se relâchèrent et mon envie de le satisfaire tomba sous la barre du zéro. Je me sentais humilié, honteux et terriblement triste. J’avais l’impression d’être une de ses victimes. Quelqu’un avec qui il avait joué quelques minutes avant de tout gâcher pour le simple plaisir de voir la personne se décomposer sur place. Offrir son intimité à quelqu’un pour ensuite se faire recaler, ça devait être l’une des pires humiliations que l’on pouvait éprouver. Je ne bougeai plus, mes lèvres toujours à quelques millimètres des siennes. Est-c’que c’est un jeu ? murmura-t-il contre mon visage alors qu’une de ses mains vint agripper mes cheveux bouclés. Je perçus dans sa question un ton à la fois coléreux et défiant. Un frisson me parcourut l’échine; la peur s’insinuait de nouveau en moi telle un poison. Cette peur qui s’était échappée de mon être quelques minutes auparavant avait fini par revenir au galop en le voyant si déterminé à jouer. Non, je n’avais pas envie de jouer moi. Je ne pris même pas le temps de répondre à sa question, beaucoup trop anxieux à l’idée de le provoquer involontairement. Je ne voulais pas mettre de l’huile sur le feu. Mon absence de réponse le poussa à reprendre le dessus presque aussitôt. Il s’enfonça un peu plus sur moi et ses lèvres descendirent dangereusement jusqu’à mon cou où, dans une morsure peu délicate, il y apposa sa marque. Définitivement, je me sentais réellement comme une de ses proies. J’étais tétanisé, tant par l’humiliation que je venais de subir que par son comportement des plus terrifiants. J’avais peur de ce qu’il était capable de me faire. J’avais peur de lui, comme avant. Et je me maudissais intérieurement de m’être laissé emporter par mes sentiments. Mais avant-même que je ne puisse reprendre mes esprits, Kiran plongea ses mains sous mon boxer qu’il s’empressa d’ôter. Mon érection était à présent bien visible et je me retrouvai entièrement nu sous ses yeux. Mes joues virèrent au rouge et mes mains se dirigèrent instinctivement vers mon intimité que je tentais vainement de cacher. Car oui, j’avais à peine eu le temps de bouger le pouce que Kiran m’avait cloué sur le lit de ses mains féroces. Son regard m’effrayait, dénué de toute tendresse. Ses lèvres se plaquèrent sur les miennes sans ménagement, avec une bestialité qui me mettait atrocement mal à l’aise. Je me sentais bafoué. J’imaginais déjà mon viol. Et à cette pensée, mon corps réagit instinctivement. Je tournai la tête sur le côté pour l’empêcher de m’embrasser et je commençai à me débattre pour qu’il cesse son étreinte. Lâche-moi espèce de taré ! Kiran avait une telle force que j’avais l’impression de ne pas pouvoir m’en sortir. Non c’était pas un jeu, j’avais aucune envie de jouer ! Tu changeras jamais ! Je continuai de me débattre sous son corps qui me maintenait cloué au lit. Si tu veux me baiser, va falloir me tuer d’abord, parce que tu violeras jamais mon intimité sans que je me batte avant. J’avais planté mon regard assuré dans le sien et, malgré les larmes qui commençaient à ruisseler de chaque côté de mes yeux, les traits de mon visage étaient durcis par la rage que j’éprouvais à son égard. Alors Kiran, c’est ça que tu veux ? Me baiser ? Comme tu le fais avec tes autres proies ? Crois-moi, tu m’auras pas comme ça. Plutôt crever que d’être souillé.
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Sujet: Re: « l’on hait avec excès lorsque l’on hait un frère. » Dim 29 Sep - 18:53
J’me souvenais de ce soir-là. Quand Travis m’avait demandé de l’embrasser. Il n’avait pas cillé. Sa voix était devenue dure, sans appel et ne laissait pas de place à la discussion. De toute façon, j’avais été trop déstabilisé pour réfléchir, et emporté par la passion du jeu et du danger, j’avais poussé un peu plus loin le vice qu’était notre relation malsaine. J’en payais désormais le prix, et finalement, même si j’avais obtenu de mon frère exactement ce que j’avais toujours souhaité, le voir devenir aussi calculateur m’angoissait. Je n’aimais pas la façon qu’il avait de me regarder, avec cet air défiant mon autorité. Il n’avait jamais osé se rebeller, il s’était plié à mes exigences sans que je n’ai à hausser le ton mais j’avais la sensation désagréable que les choses risquaient fort de se compliquer. Il représentait certes un défi de taille, mais malgré ce que je m’évertuais à montrer jour après jour, il avait trouvé la faille, la seule qui pouvait me briser. Et il m’attaquait encore et encore, et si je tenais encore ce n’était que par miracle et par esprit de contradiction mais au fond, j’avais presque envie de m’effondrer et de rendre les armes. J’aurais pu lui faire l’amour. J’aurais pu parcourir sa peau de caresses tendres et attentionnées, prendre mon temps afin de lui faire apprécier cet instant et le rendre magique pour nous deux. Mais ce n’était pas ce qu’il voulait. Il voulait jouer. Comme toujours. C’était encore une de ses idées tordues pour me prouver que lui aussi avait du caractère et qu’il en avait assez de se laisser marcher dessus et de s’écraser devant moi. Cette simple perspective me révulsait, parce que pour une fois, j’avais été prêt à baisser ma garde. J’avais eu envie de lui offrir des souvenirs impérissables, de le voir prendre du plaisir et il balayait tous mes espoirs d’un revers de main. Je le sentais se raidir sous mes baisers, sous mes morsures brutales. Sauf que je n’avais pas l’intention de m’arrêter en si bon chemin. S’il espérait que je le prenne comme une chienne, j’allais le faire. Après tout, ce n’était qu’un jeu. Toujours ce foutu jeu. Nu et vulnérable, il semblait se rendre compte de ce qu’il avait provoqué. Son erreur risquait de lui coûter cher, jusqu’à son intégrité physique, et il était terrorisé. Il voulait faire marche arrière, parce qu’il n’avait pas la carrure pour assumer ce genre de désirs. Il avait soudainement changé d’avis et même si je n’avais pas envie de le laisser partir et fuir ce qu’il avait lui-même cherché, je relâchai un peu la pression sur ses poignets pour mieux me concentrer sur mes démons intérieurs qui menaçaient d’exploser d’un moment à l’autre. Et si je les laissais faire, je savais que toutes les barrières que la raison m’imposait encore s’affaisseraient et que je deviendrais parfaitement incontrôlable. Alors, comme à mon habitude, je souriais. Pour ne pas laisser transparaître la souffrance qui était la mienne à me faire jeter par l’homme que j’aimais d’une manière obsessionnelle, j’me mettais même à rire.
J’voyais bien qu’il ne comprenait pas, il me prenait sans doute pour un taré et il avait d’ailleurs parfaitement raison de s’inquiéter mais je ne pouvais de toute façon pas lui faire de mal. Il était ma chair et mon sang et venait de me trahir, et j’étais encore pas foutu de le cogner. « T’as beau essayer d’te persuader du contraire, t’es l’même genre de connard que moi. » J’étais étonnamment calme, mais en réalité l’apparence impassible que je conservais en toutes circonstances dissimulait une fureur sans précédent. Il n’avait jamais eu envie que je lui fasse l’amour, il s’était contenté de réagir exactement comme je le faisais si souvent avec lui. Il m’avait manipulé, et je me retrouvais comme un con devant lui à comprendre qu’à ses yeux je n’étais rien de plus qu’un tortionnaire. Sauf qu’il avait oublié à qui il se mesurait. Je n’étais pas prêt à le laisser prendre le dessus, et tant pis si je devais le punir sévèrement pour lui rappeler sa place. « Tu t’rends compte que t’étais prêt à te faire baiser par ton propre frère juste pour lui prouver que t’es capable de lui tenir tête ? » Mes mots étaient volontairement durs. Je cherchais à le faire réagir, à le pousser à bout. Il était fatigant à toujours rester maître de lui-même, à essayer de rester insensible alors que je savais pertinemment que j’le touchais, quelque part. J’le connaissais trop bien, il ne pouvait rien me cacher, et pourtant je m’étais planté. J’avais cru, naïvement, qu’il m’aimait comme je l’aimais. Qu’il voulait me le prouver en s’abandonnant entre mes mains expertes. Ce n’était visiblement pas ce qu’il avait en tête cependant et ça me mettait hors de moi. Pour une fois, je préférai le libérer de mon emprise et le laissait nu sur notre lit pour aller fouiller dans le tiroir de la commode et en sortir un paquet de cigarettes. Ma tête me tournait, mes jambes flageolantes me portaient à peine et j’avais grand besoin de souffler, si bien que je finissais par m’allumer une clope en déambulant dans la chambre sans jamais parvenir à poser les yeux sur lui. Il me rendait malade autant qu’il me rendait dingue, mais surtout, il me faisait rire. A toujours vouloir se différencier de moi, à vouloir s’échapper de mes griffes il était devenu tout ce qu’il détestait. « T’es pathétique Travis. » crachai-je à son intention sans lui offrir le moindre regard, parce qu’il ne méritait manifestement pas que je m’intéresse à sa personne. Pas pour ce soir en tout cas. Il avait fini par m’atteindre, il m’avait touché et parce que je refusais de le laisser gagner, j’me sentais obligé de devenir une vraie ordure avec lui. Je supportais pas de me dire qu’il s’était servi de moi, j’étais pas l’une de ces minettes naïves dont on abuse sans le moindre remord, c’était moi le monstre dans l’histoire, c’était moi le prédateur. S’il voulait jouer, j’allais endosser le rôle qui m’allait le mieux. Mais à l’instant où je me retournais pour reprendre le contrôle de la situation, j’ancrai mon regard dans le sien et n’arrivais plus à me raisonner. Bordel c’qu’il était beau à ne pas savoir comment se comporter avec moi. Bordel c’qu’il était beau. J’en avais marre d’être incapable de le traiter comme n’importe quelle pute que je m’étais tapé. Et je m’en rendais compte, là, debout devant lui à tirer sur ma clope comme un pompier pour essayer en vain de me détendre. Mes mains tremblaient encore de la colère que j’éprouvais à son encontre, mêlée à un désir irrépressible qu’il avait attisé avant de l’éteindre brutalement comme pour me rabaisser à un statut de vulgaire plan cul. C’était pas moi ça. Moi, j’étais sa moitié, j’étais son double, il avait aucun droit de me faire croire le contraire. « Putain mais pourquoi tu peux pas m’aimer ?! Pourquoi tu veux pas d’moi ?! » Je craquais, je criais. Il avait été trop loin. Il m’avait rejeté froidement, et j’acceptais pas un refus de sa part. Malgré moi, mes yeux s’emplissaient de larmes que je n’assumais pas, parce que putain ça faisait tellement mal.
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Sujet: Re: « l’on hait avec excès lorsque l’on hait un frère. » Dim 8 Déc - 21:22
L’on hait avec excès lorsque l’on hait un frère. Jean Racine avait parfaitement raison. Il ne se passait pas un jour sans que je ne pense à lui et que je me rende compte à quel point je pouvais le haïr de tout mon être. C’était une relation étrange qui nous unissait, qui faisait naitre en moi des sentiments totalement différents, paradoxaux. J’avais l’impression d’être balloté entre deux ressentis, celui de la haine et celui de l’amour. Celui de l’amour car c’était mon frère, ma moitié, l’être auquel j’étais uni depuis ma naissance. Rien ne pourrait détruire notre lien privilégié, ce grand mythe de l’empathie gémellaire, cette force de la nature qui me poussait à rester auprès de lui aussi longtemps que je le pourrais. Celui de la haine car c’était mon frère, ma moitié, l’être auquel j’étais uni depuis ma naissance. Rien ne pourrait détruire notre lien destructeur, ce grand mythe de l’emprise gémellaire, cette force de la nature qui me poussait à rester auprès de lui aussi longtemps que je le pourrais. Les raisons de ressentir l’un ou l’autre de ces deux sentiments s’entremêlaient, s’entrechoquaient, provoquaient en moi un combat de tous les instants, une bataille acharnée pour savoir sur quel pied je devais danser. Il était à la fois Abel et Caïn, le Bien et le Mal, celui qui encaissait et celui qui tuait. Il était certes rare qu’il se fasse victime, mais lorsque j’arrivais à prendre le dessus, comme aujourd’hui, il était certain que sa vengeance allait s’avérer particulièrement destructrice. Parce qu’il était ainsi. Provocateur, revêche et malsain. Manipulateur et dominateur. Machiste et chaotique. Suicidaire. L’idée-même de se rabaisser devant moi, de se sentir inférieur, c’était une chose qu’il ne tolérait pas. Ça le mettait hors de lui, le rendait encore plus violent que d’ordinaire, l’empêchait de penser humainement. Et malgré tout cela, malgré la souffrance que j’éprouvais en me tenant si près de lui, si près du pêché et du danger, je ne voulais pas le quitter. Je ne pouvais pas imaginer un seul instant pouvoir l’abandonner. Il était ce phare dans l’obscurité, l’étoile de mes nuits et le soleil de mes jours. À ses côtés, aussi étrange que cela puisse paraître, je me sentais protégé. Pas protégé contre lui, mais protégé du monde extérieur. Car le monde extérieur me faisait certainement plus peur que mon propre frère. Peut-être était-ce là ce qu’il avait toujours voulu, m’empêcher de tisser d’autres liens que lui à l’extérieur de notre cocon fraternel. Une prison, une emprise qu’il alimentait chaque jour un peu plus.
Le plus paradoxal dans tout ça, c’était que mon frère et moi avions beaucoup de mal à communiquer. Malgré notre lien gémellaire et cette complicité si flagrante qui nous unissait, il était difficile pour nous de se comprendre. Même avec le temps, même après s’être observé durant vingt ans, il était rare que l’on sache exactement comment l’autre allait réagir. On spéculait, parfois on se trompait, parfois non, mais il n’était aucunement question de certitude. Si Kiran réagissait à sa guise, moi, je réagis comme il le souhaitait. Constamment. Il n’y avait alors aucune place pour l’improvisation ou les devinettes. Kiran savait parfaitement que je suivrais ses recommandations sous-entendues. En revanche, lorsqu’il s’agissait pour moi de m’affirmer, comme aujourd’hui, l’incertitude de mes réactions mettait mon frère hors de lui (encore une fois). Et c’était dans ce genre de moments que je me rendais compte à quel point Kiran ne me connaissait pas aussi bien qu’il l’aurait voulu. J’avais beau essayer d’être subtile, de tenter de lui faire passer un message, il s’obstinait à ne pas comprendre. Alors que j’espérais qu’il se montre passionné et tendre envers moi, qu’il se laisse aller sans devoir tout contrôler, il gâchait tout à nouveau et s’emportait sans réfléchir une seule seconde. Je l’avais attisé, j’avais laissé tomber mes barrières morales pour m’offrir à lui, lui offrir ma virginité fraternelle incestueuse. Malheureusement, ce pas de trop en avant que j’avais fait l’avait conduit à réagir bestialement, intimement persuadé que je ne cherchais qu’à jouer avec lui. Comment pouvait-il penser une telle chose ? Je lui avais répété maintes et maintes fois que je n’étais aucunement comme lui, que je n’avais rien à voir avec son côté calculateur insensible. Pour autant, c’est l’image qu’il avait de moi présentement; un rival près à le faire tomber, alors que je ne recherchais que sa tendresse…
Dénudé, mon intimité dévoilée, mon désir parfaitement visible, je me sentais bafoué. Il me tenait cloué au lit, ses mains tenant fermement mes poignets. Il s’était calé entre mes cuisses, m’empêchant par la même occasion de me débattre avec mes jambes. Il me faisait prisonnier, et ça le faisait rire. Un rire qui raisonnait dans ma tête alors que, les yeux fermés et une grimace pourfendant mon visage, je cherchais à m’extraire vainement de son emprise. Mais il avait trop de force, et je m’épuisais pour rien. En apparence, il semblait reprendre peu à peu son calme, mais je savais pertinemment qu’à l’intérieur, Kiran devait bouillir de rage. Jamais il n’avait laissé quelqu’un lui tenir tête, et jamais il n’avait accepté d’affront. Je ne savais plus comment réagir, ni comment lui faire comprendre que je n’avais aucune envie de me mesurer à lui. Pour autant, devais-je à nouveau me rabaisser ? Et avant même que je n’ai à répondre à cette question, Kiran finit par relâcher son emprise sur moi. Ce geste m’arracha un hoquet de surprise, tellement persuadé qu’il ne capitulerait jamais. Je le vis se lever pour rejoindre la commode, fouillant dans un tiroir pour en sortir un paquet de cigarettes. J’observais son corps à demi-nu, son boxer seyant parfaitement les muscles de ses cuisses et son intimité. Aussi étrange que cela pouvait paraître, je n’aimais pas qu’il me tourne ainsi le dos. Je n’aimais pas le voir capituler. J’avais l’impression d’être moi-même un Kiran. Un être qui blessait sans scrupule. Je savais que je l’avais touché en plein cœur à ce moment-même, parce qu’en temps normal il n’aurait jamais lâché l’affaire. Et le voir ainsi, ça me tuait. Ça me rongeait de l’intérieur. Je n’étais pas un garçon méchant.
Kiran se mit à faire les cent pas dans la chambre, perturbé, tirant frénétiquement sur sa clope en crachant son venin. Sans pour autant jamais poser un seul instant son regard sur moi. Être nu dans ce lit n’avait alors plus aucune importance pour moi. Je le voyais bouillir, ruminant sa vengeance, se demandant sûrement de quelle façon il devait réagir. C’était toujours comme ça, avec Kiran. Il ne pouvait pas s’empêcher de tout calculer. C’est toi qui es pathétique. Tu comprends rien. Tu ne me comprends pas. Tu ne me comprendras sûrement jamais. T’es beaucoup trop centré sur ta petite personne. Tout doit toujours tourner autour de toi. Tu penses que chacune de mes réactions est un message qui t’est adressé. Mais navré de te décevoir mon grand, tu fais fausse-route sur toute la ligne. J’étais pas en train de jouer là. Je me laissai tomber en arrière, sur le dos, enfoui dans les couettes. Je portai mes mains à mon visage que je frottais énergiquement, comme pour me réveiller d’un mauvais rêve. Mais c’en était pas un. C’était bien réel. Aussi réel que les cris de Kiran qui fusèrent juste après. Aussi réel que sa voix tremblante. Je me redressai alors vivement, observant ce frère que je n’avais jamais vu ainsi. Là, devant moi, les yeux de Kiran s’emplirent de larmes. Il se demandait pourquoi je ne pouvais pas l’aimer. Et cette phrase me fendit littéralement le cœur. Je me levai alors de ce lit de fortune au sol, ne prêtant aucunement attention à ma nudité qui, d’ordinaire, m’aurait mis mal à l’aise. Je m’approchai de Kiran, lui qui écrasait finalement sa cigarette dans le cendrier sur la commode. Il tremblait, de tout son être. Chaque cellule de son corps tremblait. Sans réfléchir davantage, je me jetai soudainement dans ses bras, posant ma tête sur le haut de son torse. Je ne voulais plus le laisser partir, je ne voulais pas qu’il s’imagine que je pourrais l’abandonner. J’ai peur… Murmurai-je. J’ai peur de ce qu’on peut faire quand on est que tous les deux… Je détachai légèrement ma tête, plongeant mon regard vert dans le sien.
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Sujet: Re: « l’on hait avec excès lorsque l’on hait un frère. » Mer 29 Jan - 12:10
J'ignorais à quel moment Travis avait commencé à vouloir prendre ses propres décisions. Peut-être n'avais-je simplement pas été capable de m'en rendre compte, aveuglé par mes envies et désirs irrépressibles à son encontre. Depuis notre plus jeune âge, il s'était reposé sur moi et m'avait fait le gardien de notre avenir commun. J'avais accepté ce rôle car je savais qu'il n'avait pas les épaules pour l'endosser. Malgré les nombreux vices desquels il m'accusait constamment, il n'avait jamais remis en cause cette sorte de hiérarchie qui semblait l'étouffer aujourd'hui. Pour cette raison, j'avais du mal à comprendre véritablement ce que j'avais fait de mal, en tout cas, je ne parvenais pas à identifier clairement le problème et le malentendu devenait la cause d'une dispute violente, douloureuse mais probablement nécessaire.Le voir se rebeller ainsi me donnait l'impression d'avoir manqué quelque chose, de ne pas l'avoir écouté suffisamment, et j'étais parfaitement conscient que je ne le rendais pas heureux mais j'avais naïvement cru que l'amour qu'il me portait était encore trop intense pour qu'il n'en vienne jamais à envisager de se séparer de moi. J'étais désormais forcé d'ouvrir les yeux : l'emprise qu'il exerçait sur moi était bien réelle, même si j'avais essayé de m'y soustraire en lui rappelant sa place dès que l'occasion m'était donnée. Son regard dur me ramenait aux origines de notre relation malsaine, je réalisais enfin que j'avais réussi à souiller en lui tout ce qu'il y avait de pur et que je n'aimais pas ce que j'avais fait de lui. Autrefois un être si fragile, innocent, et il se tenait maintenant devant moi à me défier comme pour me punir de tout ce que je lui avais infligé par le passé. Le bourreau se transformait en victime, et je n'étais pas habitué à ce statut si bien que j'encaissais mal la douleur de mon cœur qui se brisait chaque fois qu'il prononçait un mot. Avant que tout ne dérape entre nous, Travis était mon double. Il y avait eu une période de notre existence durant laquelle nous nous ressemblions véritablement. Mais très vite je m'étais distingué par des aptitudes exceptionnelles à la manipulation, et lui était trop faible ou trop honnête pour me suivre sur le chemin tortueux que j'avais emprunté, si bien qu'il était resté là à me regarder devenir le monstre que j'étais à présent sans pouvoir rien faire pour m'en empêcher. Finalement, il avait peut-être appris plus que je ne le pensais et il se servait de tout ce dont il avait été témoin pour se retourner contre moi, sans doute fatigué que je ne me serve de lui comme d'un jouet. Ça n'avait pourtant jamais été mon intention. Si lui ne le voyait pas, je n'avais jamais cessé de le considérer comme ma moitié et j'aurais tué de mes propres mains quiconque lui aurait fait du mal. Mais puisque j'étais précisément celui qui l'avait détruit, je n'étais plus sûr de la conduite à adopter en sa présence et j'avais la sensation de me noyer dans un tourbillon d'émotions que j'étais incapable de contrôler puisqu'il était le seul à pouvoir me raisonner dans ces moments-là.
Au fond, même si on n'était pas foutus de se parler ouvertement, on arrivait toujours à calmer le jeu. Parce que ni lui ni moi n'aimions ce genre d'affrontements. J'avais trop longtemps profité de ma supériorité sur lui, j'avais pris grand plaisir à me jouer de ses sentiments sans imaginer une seconde qu'il puisse un jour décider que c'en était trop. Je crois que j'aurais vraiment aimé, pour une fois, me laisser aller dans ses bras. J'aurais aimé qu'il m'accorde pleine confiance, qu'il m'offre une nuit de répit. C'était comme si tout autour de nous était destiné à nous empêcher d'être ensemble. La morale d'abord, notre mère qui s'opposait à notre amour, et j'imagine que moi aussi j'en venais à saboter cette complicité, cette relation parce que je n'étais pas à même d'admettre que mon propre frère me rendait fou. Il était le seul à pouvoir m'atteindre et il avait malheureusement fini par le comprendre, ce qui le rendait d'autant plus dangereux qu'il semblait décidé à me faire mal comme je lui en avais fait par le passé. Je lui avais appris les règles du jeu et je me retrouvais pris au piège, aux griffes d'un monstre que j'avais moi-même engendré. Ce rival, je devais le neutraliser avant qu'il ne me fasse tomber. Je n'étais clairement pas prêt à céder ma place de leader, et ce même si je devais détruire tout ce qui restait de bon en lui. Alors, pour la première fois depuis tant d'années, je craquais. J'abandonnais mon éternel sang froid pour laisser exploser ce trop plein de sentiments qui me bouffaient et me rongeaient de l'intérieur, sans quoi je risquais de perdre définitivement la raison. J'aurai sans doute été capable de lui faire mal, de le frapper encore et encore pour qu'il comprenne à quel point je souffrais de savoir que j'étais sur le point de le perdre. Mon corps parlait pour moi et pourtant je ne pouvais pas continuer ; à bout de forces, je relâchai mon emprise sur ses poignets pour lui rendre la liberté qu'il convoitait tant et je m'éloignai de lui autant que possible comme si cela pouvait changer quoi que ce soit. J'essayais encore de garder un semblant de contrôle sur une situation que je ne maîtrisais plus du tout. Lui était toujours nu sur notre lit de fortune, le lit qui avait vu naître notre amour passionnel tandis que je faisais les cent pas dans la chambre. Même la clope sur laquelle je tirais frénétiquement depuis cinq bonnes minutes ne parvenait pas à me calmer, et j'ignorais combien de temps encore j'allais devoir faire bonne figure pour ne pas lui montrer la détresse que j'éprouvais réellement.J'avais sous-estimé la force et le courage qu'il lui avait fallu pour me supporter toutes ces années et qui l'avaient finalement conduit à me détester au point de me prendre à mon propre jeu. Jamais je ne me portais en victime et pourtant il me fallait l'accepter, il avait gagné. Dans un soudain élan de rage mêlé au désespoir qui me prenait à la gorge, je lui criais de m'aimer comme il avait aimé cet autre garçon, je lui demandais pourquoi je n'arrivais pas à le faire vibrer autant qu'il le faisait avec moi sans s'en rendre compte. A cet instant, j'avais l'impression de me perdre moi-même et il vint alors m'entourer de ses bras pour me ramener les deux pieds sur terre et me murmurer d'une voix faible et tremblante combien nous pouvions être dangereux l'un pour l'autre. Et parce que j'en avais cruellement besoin, je m'accrochais violemment à lui et le serrait presque à l'étouffer contre moi. Je le voulais, lui et pas un autre. Ce soir. « Et moi j'ai peur de c'que j'peux devenir si tu m'abandonnes... » soufflai-je pour toute réponse à ses craintes. J'avais envie de me battre pour lui. Il devait comprendre que je n'étais pas prêt à le laisser partir, à lui offrir une quelconque échappatoire qu'il trouverait dans les bras d'un parfait inconnu bien incapable de l'aimer comme je l'aimais. Enfin je reprenais contenance, j'étais un peu plus assuré et mes mains vinrent doucement encadrer son visage pour le forcer à affronter mon regard, que je voulais, pour une fois, tendre et rassurant. Mes lèvres se joignirent aux siennes dans un baiser d'une délicatesse contrastant avec l'explosion des sentiments qui étaient les nôtres ; les larmes dévalaient mes joues sans que je ne cherche à les contenir, j'appréciais étrangement cette sensation de liberté à dévoiler à ma moitié ce que j'avais tenté de dissimuler toute ma vie durant. Ma main glissait dans son dos pour le rapprocher encore de moi, comme si cela pouvait apaiser cette foutue impression de toujours manquer de lui. La division de nos cellules dans le ventre de notre mère avait créé un trou béant au fond de ma poitrine que je cherchais constamment à combler et je ne me sentais jamais vraiment moi-même. Etait-ce pour cette raison que j'éprouvais le désir malsain de m'unir à lui, mon double, mon frère ? Je voulais peut-être connaître une fois seulement un état serein et apaisé, et j'étais persuadé que c'était là la seule manière pour moi de me trouver, de me comprendre pleinement. « Tu fais partie d'moi, j'ai besoin d'toi, de te sentir près de moi... Me laisse pas, s'te plaît. » finis-je par le supplier, mes lèvres tremblant contre les siennes, les effleurant avec une sensualité presque involontaire.
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« l’on hait avec excès lorsque l’on hait un frère. »