Le ciel est rouge. Il t'appelle. Il est sang. Il reflète sa lueur sur ton visage blême. Enveloppé de ce long brouillard. Tu te protèges. Tu souffles brouillard. Tu souffles la subtile buée des matins endormis. Tu commences à voir flou, trouble. Laisse-moi t'enlever ton masque, ton ignoble masque. Ce qui est gribouillé sur ta face. Tu as le visage irrégulier, asymétrique. Ça se voit encore plus quand le firmament rouge crépite ces jets de couleurs. Ça ne t'empêche pas de faire naitre des pépites plein les orbites. De faire pousser des météorites sur tes ophtalmiques. Ça te brule les cornées. Ça te charbonne la rétine. Ça te pique, c'est limite cadavérique. Tu vas sans doute bientôt enterrer tes hublots. Mais, c'est tellement beau, tu veux bien souffrir pour voir danser ce spectacle. Cette splendeur miroitante. Ça clique entre tes lèvres, ta mâchoire se rétracte.

Et c'est pendant ces moments-là que tu as la forte impression que ta vie t'appartient, que le temps n'existe pas. Qu'il est pour les autres. Le malheur ne t'appartient pas. Tu as l'impression que tout est figé et tu aimerais tellement, tellement que tout reste à l'infini. Tu le pris, tu le souhaites. Toujours, encore et encore. Tu le tiens entre tes mains, tu le sers fort, si fort que tu sens tes os se dissoudrent sous ta couche de peau flétrie. Tu redresses tes hublots. Est-il là ? Derrière toi ? À côté de toi ?

ROUGE, ROUGE, ROUGE.
Est-ce que c'est le Soleil qui nous dit bonjour ? Est-ce que c'est l'astre Dieu qui explose ? Est-ce que c'est l'Enfer ? Tant pis, c'est beau. Mais Pan explose à son tour, petit être d'électricité, impossible de tenir en place avec cet éclair coincé en travers de la gorge.
C'est déjà pas très commode quand ça repose tranquillement dans l'estomac.
Et évidemment, il a toujours le hoquet quand les éclairs sont rangés bien à leur place.
Il saute de nuage en nuage, comme si l'un d'eux allait capturer la foudre. Mais si Pan, il restait éloigné des nuages, ils lui auraient jamais refourgué quelques uns de leurs éclairs. Mais Pan c'est un gosse, pas mal élevé mais curieux, Pan il a voulu aller voir les nuages de plus près. Et les nuages ils aiment pas ça, qu'on vienne les chatouiller de trop près.
Au cours de son voyage, Pan tombe sur un inconnu, les yeux tellement accrochés au ciel rouge de colère ou écarlate d'amour qu'il ne remarque pas l'arrivée du jeune éclair d'orage ambulant. Alors Pan lui tombe dessus oui. Littéralement.
Il pique quand il touche les autres, Pan. C'est une décharge électrique. Et sa mère lui a toujours dit de s'excuser quand on électrocute les inconnus, même si c'est involontaire.
- Excusez-moi, qu'il s'excuse, alors.

Ça sursaute, tu sursautes. Bondissement, sautillement. T'as l'impression d'être diamant, juste un instant. Mais c'était bien là. Même tes lunettes d'aviateur ont vu. Elles ont vu la chose. L'astre qui crispe. Qui s'agite. Tout est carmin, ce n'est pas très malin. Tu n'y vois pratiquement rien, mais lui c'est quasiment impossible de le louper. Impossible de manquer sa chute, il te déstabilise pratiquement. Il te met en danger. Tu traverses ce léger nuage, tu traverses ton foyer. Tu as fait une chute trois mètres plus bas. Heureusement qu'ils étaient là, les cirrus et les cumulus. Tu aurais pu chuter. T'écraser des kilomètres plus bas. L'avalanche t'a fait oublier ta romance. Puis, cette sensation, cette cataracte qui terrasse, ça t'a entièrement désarticulé. Ça fourmille entre tes doigts, tu le sens encore. Tes dents vibrent, tes pieds oscillent.

Tu te relèves, tu essayes. Où sont passés tes hublots ? Tu te retournes. Tu t'embobines un peu, ça te mélange. Ce te secoue. Ce n'était pas la fondre qui a tonné dans ton dos. Tu as été complètement foudroyé, exécuté. T'étais dans ta cellule sur une chaise électrique. Elles sont sans doute restés là-haut. Tu lèves ta tête, flou, là où tu penses être la source. Quelques mètres là-haut, tu le vois le coupable. Tu le vois l'exécuteur. Il t'a détrôné. « Rends-moi mes lunettes, foudroyeur ! ». tu le dévisages, ou plutôt, tu essayes de découvrir qui il est, par son regard. T'essayes de lire dans ses yeux, mais tu n'y arrives pas. Tes paupières et tes sourcils se froncent. « Tu es qui ? »

Mais l'inconnu lunetté est déjà loin, sous Pan, il a dégringolé de nuage en nuage, comme un flocon de neige ou une poussière rebelle, il a failli se prendre le soleil explosif en pleine tronche et brûler avec lui. Oh, si ça avait été ça, Pan se serait auto-électrocuté de culpabilité.
Mais RÀS. Pas de mort, juste quelques brûlures d'orage. Et un myope trois nuages plus bas.
- Rends-moi mes lunettes, foudroyeur !
Ça doit être effrayant d'avancer à l'aveuglette dans la vie. Alors Pan cherche des lunettes, vite, et elles sont là. Deux ronds de verre à moitié engloutis par la matière nuageuse.
C'est que c'est gourmand ces saloperies-là.
En les récupérant, il se fait presque bouffer la main.
- Tu es qui ?
Bonne question.
- L'enfant-orage. Pan.
Leurs voix résonnent contre le vide de l'endroit, l'absence de substance ici. Et derrière eux, le Soleil continue le spectacle de l'explosion, mais plus personne ne regarde. Trop d'histoires de lunettes.
Qu'est-ce que c'est terre-à-terre.
Et Pan, il prend son élan, bondit de l'altostratus jusqu'à l'anonyme bigleux.
- Attention en touchant les lunettes, j'ai pu y mettre de la foudre sans faire exprès.
Il se racle la gorge avec gêne. Ça chatouille, la foudre. Comme quand on avale un chaton sans faire exprès. Sauf que là y a l'électricité en plus, on la voit briller dans les yeux du gosse. Et Pan, d'ailleurs, il peut à peine se toucher lui-même.
Fardeau que de transporter des éclairs.
Il s'installe avec méfiance dans la vapeur cotonneuse du nuage. Il leur fait moyennement confiance depuis cette affaire d'orage.
- Tu t'appelles comment ?

Bizarre.
Étrange, tu ne t'étais même pas rendu compte de ta blessure avant de la voir. Elle gît là, sur le dos de ta main, tu n'oses même pas soulever ta manche de peur d'y découvrir d'autres, et encore d'autres. Elle flamboie, elle a la même couleur que le nuage qui te maintient. Encore un peu plus et ta main devenait irréel, invisible à tes yeux. Arrête, continue de le regarder, il va s'en aller. C'est un voleur, tu en es persuadé. Tu n'as pas envie de finir froissé.
- l'enfant-orage. Pan, le contraire serait étonnant. C'est un vilain, plein d'entrain.
Il a les mêmes éclairs qui cristallisent ses yeux. Puis, ces cheveux et son teint, il a tout pour être un assassin. Tu n'y vois rien, mais tu sais déjà à quoi il ressemble. T'aimerais reculer, mais tu as peur de mettre tes extrémités dans un abysse éventré. S'il le faut tu iras récupérer toi-même tes trophées, toi-même tes indispensables.
- Attention en touchant les lunettes, j'ai pu y mettre de la foudre sans faire exprès.  
Tu as vu l'ombre sautiller, arriver à tes pieds. Arriver sur ton socle. Sur ta berceuse. Il ne va tout de même pas lui voler son nouveau berceau de coton, se dit-il. Alors tu attrapes ton bien, brusquement. Tu les secoues légèrement, tu prends garde à ne pas prendre un autre coup d'électricité statique. Et ce coup-ci tu les accroches bien, tu les fixes correctement au niveau de tes cavités oculaires, sur le creux du nez, et tu attaches la boucle derrière ton crâne. La confiance coule à nouveau en toi. Finalement il n'a pas l'air si méchant que ça. Juste intrigant. Toutefois tu n'oublies pas de te méfier du loup qui dort.
- Tu t'appelles comment ?
Tu cabres ton dos aussi droit que tu puisses le faire, et, les mains volantes sur tes hanches, tu lui sonne :
- moi, c'est feliks, le plus grand des aviateurs de la voie lactée, d'un sourire triomphant, tu n'as pas envie de faire prendre de vanité, mais prononcer ces mots est pourtant si rassasiant. Et toi ? Que fais-tu ici ? Voleur d'orage, finalement tu es en train de cogiter, tant qu'il ne te fera pas devenir crédule. Pas question de te faire berner. Sale entêté.

Quelle suffisance quand il se dit « plus grand des aviateurs de la voie lactée », l'inconnu, le Feliks. Et ça fait sourire cet enfant-foudre de Pan, c'est tellement innocent, c'est tellement authentique. Et prometteur. Pan lui fait les yeux doux, ronronne en silence : tu m'emmènerais chatouiller les astres, courir sur l'anneau de Saturne ?
- Et toi ? Que fais-tu ici ?
Longue histoire de nuage. Pan s'y enfonce d'ailleurs, il se dandine pour s'en sortir un peu, manquerait plus qu'il s'en sorte avec un bout de fesse en moins. Ils sont gloutons, les nuages. De vrais salauds de de goinfres.
Et dans la gorge de Pan ça commence à chatouiller. Est-ce que ce sont les mots que Pan avaient l'intention de souffler qui grimpent jusqu'à ses lèvres, ou qui sont pris d'un fou rire ?
Oh, là, non, c'est la foudre qui se réveille.
Celle qui fut avalée de travers. Ou qui a essayé de se sortir de l'estomac de Pan, en vain.
Il tousse, Pan, et il rit en même temps, c'est que ça chatouille un éclair qui essaie de se frayer un chemin au travers de vos amygdales. Un fou rire de quelques poussières de minutes car bientôt l'éclair trouve la sortie, entre les lèvres du garçon. Éternuement magistral, qui projette l'éclair quelques nuages plus loin.
Pan sourit.
Un de moins.
Il se sent comme un peu moins électrique soudain.
Et, près à reprendre la conversation, se tourne vers son nouvel ami. À la main coupée en deux d'une barre rouge vive. Ça sent le passage de la foudre.
- Oh, mais tu saignes !
Il l'emmènera pas voir les étoiles.

Tu n'auras pas de réponse à ta question, tu n'en as pas besoin et en l'espace d'un instant après qu'il t'ait donné un regard miroir, un regard rêveur, plein d'étincelles électriques. Il semble se tordre en deux l'enfant-orage. Il y a quelque chose qui ne va pas, ça y est, il se réveille. Ce n'était pas un enfant en vrai. C'était bien autre chose.
T'avais raison de te méfier de lui. T'as l'impression qu'il va cracher quelque chose d'énorme, qu'il va te cracher dessus des couteaux sanglants, un monstre. C'est un monstre qu'il est en train de faire apparaître. Alors tu recules, t'essaye de courir à reculons, ce n'est pas facile, les bras des nuages te retiennent un peu sur place. Plus tu t'agites, plus tu as l'impression de t'enfoncer. C'est définitif, tu as perdu tes pieds, tu as perdu pied. Tu tombes en évitant la foudre qu'il vient d'éternuer.
C'était quoi sérieusement ? Tu te questionnes, c'est une boîte à surprise. Tu n'as même pas fait quelque mettre en arrière, tu es persuadé qu'il ne t'a même pas vu reculer. Mais maintenant t'es au sol, le bras à l'air.
Tu l'entends un peu rire, il se moque peut-être de toi.
Mais il remarque plutôt ta blessure, celle de tout à l'heure, celle qu'il t'a faite. Mais tu es trop occupé à lui demander de t'aider. Tu commences à t'affoler, à essayer d'écarter les nuages qui sont en train de t'avaler.

« aide-moi, s'il te plait. Sauve-moi. » que tu lui cries le plus fort possible.

Tu te dis dans ta tête qu'il va t'envoyer un éclair pour t'aider, tu n'as pas vraiment envie de finir électrocuté une nouvelle fois. T'espères qu'il prendra autre chose que ces bras.

Oui, il saigne, et il tombe, aussi, encore. Impossible de dire si c'est que le nuage commençait à avoir faim ou juste que Feliks s'y est enfoncé pour dégringoler ensuite, comme ça arrive tout le temps par ici, surtout par ici.
Comme si la proximité du soleil brûlant les rendait affamés.
Alors badaboum.
Un brun pilote quelques nuages plus bas, encore, toujours. Et jamais la chute dans le soleil. C'est un miracle sur pattes.
- aide-moi, s'il te plait. Sauve-moi.
Solution, solution, solution. Il a pas habitude Pan. Pan, c'est l'enfant qui se trébuche constamment, sur tout, sur rien, et qu'on sauve en un tour de main. Pan, c'est le môme qui éternue des éclairs et s'électrocute lui-même au passage.
On ne dit pas sauve-moi à Pan.
À moins d'être le plus grands des aviateurs de la voie lactée. À moins de s'appeler Feliks.
Ça tourne vite dans la petite tête blonde, ça se brouille dans les yeux bleus qui ne comprennent plus rien. Et qui comprennent soudain. Allons c'est évident. Les nuages vous mangent, oui, mais les nuages, aussi, accrochent, les nuages sont élastiques, les nuages peuvent sauver une vie, vous croyez pas ?
Alors Pan fera du nuage sur lequel il se tient : une corde pour attraper son nouvel ami. S'il veut toujours l'être après leurs péripéties.
Il se tue à la tâche, c'est joli de penser à faire d'un nuage une corde, et puis soudain ça l'est moins, quand il s'agit de faire une corde d'un nuage. Pourtant il réussit Pan. Aujourd'hui il éternue de la foudre et fabrique des objets avec la mousse des nuages. Aujourd'hui c'est son jour, à Pan.
Et avec sa corde cotonneuse, il ramène vite fait bien fait le Feliks. Sur le nuage désormais amputé d'un morceau de lui-même transformé en corde.
Il sourit, Pan. Pourtant y a pas de quoi. Feliks a l'air d'avoir fait la guerre, lui tout seul contre une armée entière d'enragés.
- Tu m'as fait peur Feliks. J'ai cru que t'allais te vautrer dans le soleil. Tu veux pas qu'on aille ailleurs ? Te soigner et voir des choses moins dangereuses. T'en connais toi des beaux endroits.

Feliks n'a pas pris le plus grand, le plus large, le plus impressionnant, le plus fantastique des aéroplanes pour atterrir ici, pour rien. Il n'a pas catapulsé ses ailes d'acier qui lui servait de bras automatique pour finir mangé par les nuages. Il n'a pas traversé la terre, des pays entiers dans une boîte métallique pour revenir avec une main ou une jambe en moins. il se débat l'aviateur, il se débat le meilleur. Jusqu'au moment où il arrive à apercevoir dans la lueur de deux cotons qui venaient de recouvrir ses verres : une corde, si légère. Il essaye de l'attraper sans savoir vraiment ce que c'est. Il essaye et il réussit. Feliks est grand, il est courageux et fort, la plupart du temps.
Les cheveux hérissés et le souffle coupé il regarde son sauveur d'une autre manière. Il passe une main sur son masque d'aviateur pour arracher les morceaux de nuages collés. Ses verres trahissent son affolement mais ses yeux lui disent merci.

« Tu es aussi docteur pour même sauver les plaies ? »

L'aviateur secoué voudrait lui dire ce mot désiré, il voudrait lui tapoter ses épaules de héros, mais il préfère lui demander de le suivre. En bondissant maladroitement il lui explique qu'il l'emmène voir les falaises de jupiter et les chutes de naines rouges, le contraste entre la mort et la vie, son paradis, près de la nébuleuse de l'aigle, là où naissent les étoiles.

Des yeux reconnaissants. Effrayés quand même. C'est pas tous les jours qu'on se fait attaquer par un enfant-orage qui n'y peut rien, et presque avaler par des nuages très malpolis qui dégustent les humains qui y posent leurs fesses pour admirer la rougeur du soleil explosant.
C'est pas tous les jours.
- Tu es aussi docteur pour même sauver les plaies ?
Effrayés aussi sont les yeux de Pan. Non, en fait, comment on soigne quelqu'un ? Pas avec de la foudre évidemment, alors avec du nuage, peut-être ?
Ou la bonté du soleil.
Mais Feliks ne relève pas le manque de capacités médicales de Pan et c'est parti pour le voyage, au revoir les nuages mangeurs d'humains de cette galaxie rougement ensoleillée.
Bonjour l'Univers.
L'Univers passe vite devant leurs yeux, ils ne s'y arrêtent pas, ils ne font pas de pause devant la Terre endormie, la Lune caressant les étoiles de son éclat. Ils ne prennent pas le temps de s'arrêter pour admirer les mille océans, le trou blanc de la vie, celui noir de la mort.
C'est comme un diaporama des plus beaux endroits du cosmos, c'est beau.
Pan sourit, oups, électrochoc.
Ils passent et ne s'arrêtent toujours pas devant ce que Feliks présente comme étant « le contraste entre la vie et la mort ».
Tant pis, tant MIEUX.
Car Pan n'a jamais rien vu d'aussi effrayant, et c'est bien connu, les enfants, ils n'aiment pas se tenir devant quelque chose qui leur fait peur. Ils tracent, donc, ils tracent, les cheveux balayés par l'air d'ici.
Et soudain Pan s'agite.
- Stop, stop, stop !
Freinage brutal.
Et Saturne qui s'éveille devant eux.
- Je ... on a le droit de faire du toboggan sur son alliance ?
Dis oui, dis oui, dis-moi oui.

C'est grand, c'est magnifique et ça, Feliks il ne l'aurait oublié pour rien au monde. C'est beau tellement beau, mais ce qu'il préfère parmi toutes ces lueurs, ce qu'il chérit le plus au monde, ce qui lui procure des tremblements de bonheur jusqu'au bout des doigts, ce qui lui donne la sensation d'être libre, d'être un géant, d'être le plus grand. C'est de fermer les yeux juste un instant pour écouter le silence. Pour pénétrer dans le silence, que les secondes se transforment en une éternité, il se pince les lèvres Feliks. Ca vide complètement ces pensées. Il sert fort, fort, fort, tellement fort ses paupières qu'il arrive à faire mal à ces cils. Qu'il arrive à faire mal à ses yeux, mais il s'en fout Feliks, ses oreilles sont enfin au repos, il sent son coeur devenir léger, à tel point qu'il se balade dans son organisme, il sent son esprit se détacher, se relaxer, son cerveau tourne sur lui-même tellement il respire la gaieté lui aussi. Il se sent saint. Il se sent ange dans la clarté des rayons du feu rouge qui les éclair au loin. Il se sent comme un aviateur ailé.
Mais pan lui fait déposer un pied à l'univers, cette fois il n'est pas seul. Il l'aurait légèrement omit. Il ne pensait plus qu'à lui.
- Stop, stop, stop ! Je ... on a le droit de faire du toboggan sur son alliance ?
Qu'il entend, stop, alors il s'arrête. Pan l'avait déjà fait juste derrière lui. Il se rapproche à quelques poussières de comète de lui. Pour regarder vers où ses yeux se dirigent.
Vers la grande, vers la dangereuse.
Il le sait feliks que ses anneaux sont bien trop glissants, il sait bien qu'ils vont les emporter bien plus loin qu'ils ne peuvent le voir. Et s'ils vont bien plus loin, feliks risque de ne plus savoir où ils sont. Feliks risque de se perdre et d'engendrer la fin de Pan avec lui. Faudrait pas qu'il croise une supernova ou une étoile farceuse là-bas. Mais il se dit qu'ils feront attention, il se dit qu'ils ne courent aucun danger pendant que le plus grand aviateur de tous les temps est là. Ils sont en sécurité. L'univers leur appartient.

« On a tous les droits, il n'y a aucune loi dans l'univers. »

Il se tourne sur lui. Il attend que Pan lui offre un sourire, il attend de voir sa réaction.

« Finalement, je suis content de côtoyer tes éclaires, Pan. »

Avec le temps il l'aime bien pan, il n'est pas si méchant.

- On a tous les droits, il n'y a aucune loi dans l'univers.
Sourire étoilé sur la face du gamin avec tout l'infini de l'enfance dans ses yeux, tous ses désirs cosmiques.
- Finalement, je suis content de côtoyer tes éclaires, Pan.
Le sourire continue. Ça ne fait même pas de l'électricité cette fois-là, ça devait être un beau sourire, assez magnifique pour ne pas réveiller les éclairs en bas.
Et puis il abandonne son sourire, parce que lui, Pan, il s'en passerait bien de la foudre dans son estomac.
- Moi je t'aime bien. C'est gentil d'me montrer tout ça.
Et puis, hésitant.
- Tu ... tu me prends sur ton dos ?
Parce que l'anneau de Saturne est beau oui, il appelle le gosse pour qu'il vienne jouer dessus, il crie, vous l'entendez pas ? Viens, viens, qu'il dit, n'empêche qu'il a un air vicieux. Et qu'après l'épisode des nuages, Pan, il peine à faire confiance aux choses du cosmos.
Manquerait plus qu'il glisse trop vite, comme une larme énervée sur une joue, qu'il tombe dans le noir et qu'il en revienne plus.
Manquerait plus qu'il rate sa partie de toboggan pour finir au fin fond d'une étoile morte.

Il prend le temps de regarder les lèvres de l'enfant-orage se courber tendrement sur son visage. C'est doux, son visage est doux. C'est aussi sain que l'air qui ne les entoure plus, que l'univers, que la voie lactée, que les étoiles qui se font aussi lointaines que soudaines.
- Moi je t'aime bien. C'est gentil d'me montrer tout ça.
C'est réciproque, c'est rassurant. Il a l'air hésitant, faut pas, a-t-il envie de lui dire, de lui chuchoter sur son doux visage. Près de ces douces oreilles, pas trop statique, pas trop électrique. Il n'y pense plus de toute façon. Il veut bien recevoir une décharge. Il veut bien recevoir ça de son peut-être nouvel ami. Feliks est très hésitant avec les émotions, il y est rarement mais l'art des émotions est un domaine qu'il contrôle beaucoup moins que les défaillances techniques de son tableau de bord, que ses lunettes d'aviateur, que ses chimères aériennes.
- Tu ... tu me prends sur ton dos ?
Il ne peut pas lui refuser cette faveur, elle aurait pu naitre des lèvres de Feliks de toute façon. Il lui tend la main, espérant ne pas avoir mal, mais de toute façon il s'en fout. Il sent le corps de l'enfant-éclair se poser sur ses épaules, mais pas la sensation qu'il avait rencontrée sur les nuages, pas la drôle de sensation des nuages, pourtant il sent qu'elle est toujours là. La sensation est certainement cachée, il le sent au fond de l'être qu'est Pan, il le sent lui traverser le corps, comme une connexion magnétique. Serait-il possible qu'il ne ressente plus rien ?
Il n'y a aucune loi dans l'univers, mais peut-être sont-elles justes modifiées ? Métamorphosés ? D'autres aptitudes, d'autres sensations, d'autres émotions. Est-ce possible ? Imaginable ? Il aimerait bien interroger son ami, mais c'est loin d'être le savoir qui s'inscrivait dans ces pensées, c'est sans doute des questions dont seul l'expérience lui fera découvrir les réponses. Alors, il s'y jette, il se hue sur l'expérience, il retient fortement les jambes de pan blotties contre son torse et se met à exalter son métier, sa passion. Il lui montre comme il est doué et surtout comme c'est amusant. Un mouvement légèrement brusque, quelques vibrations. Sans aucun mot. L'air de Saturne rejetait sa brise légère sur leurs paupières souriantes. Il n'allait pas tomber, il allait y arriver.

Parce que les étoiles elles attendent que ça, un petit Pan bien en chair, à faire griller à leur chaleur et à grignoter avec des comètes cuites à la vapeur. Un vrai déjeuner du dimanche chez maman.
Eh bien il attendra le déjeuner, aujourd'hui c'est jeudi.
Et c'est Feliks qui se charge de protéger Pan des étoiles dévorantes, il fait de son petit corps une carapace de tortue et c'est parti pour la glisse. Ski dans l'espace.
Les bras autour du cou de son grand protecteur, le vent spatial en pleine gueule, Pan, il balance même plus d'électricité, à croire que même la foudre se fait toute petite timide devant l'immensité de la bague de Saturne, à croire qu'elle ose plus se montrer.
Sourire sur les lèvres éternellement juvéniles du petit. Les yeux dans les étoiles et les étoiles dans les yeux.
En une fraction d'étoile, justement, ils se mettent à dégringoler, tomber, chuter, évidemment, il a fallu que Saturne les expulse de sa boucle, faut croire qu'elle est comme les nuages, Saturne, à pas aimer qu'on lui galope dessus. Faut pas s'auto-exposer dans l'univers, dans ce cas-là, mais plutôt se cacher dans les trous noirs.
Pan, il a la tête à l'envers comme le jour où il a bu du jus de soleil pour la première fois de sa vie. Sauf que c'est moins agréable. Ça ballote. Au ralenti, l'air est lourd par ici. Ils sont un peu comme des bouts de neige dans un boule de souvenir.
Oh qu'ils sont secoués, Pan, il en vomit un éclair.
In extremis, il l'attrape par le bout, alors voilà qu'ils sont accrochés à un morceau d'orage, piquant, l'orage, à moitié près à tomber dans l'éternité.
Suffoquant, à Feliks :
- Ça va ?

Il sentit l'anneau se dérober sous ses vêtements, il sentit quelque chose de transformer sous l'aviateur. Ils étaient pourtant si gais, frôlant, flottants sur la boucle, se laissant entrainer par l'énorme fil de vitesse qui s'enivrait par le courage de l'aviateur. Qui s'enivrait de la force de l'aviateur, par son talant. Pan, il semblait heureux, moins mélancolique. Pan, il semblait réaliser un rêve, un onirisme. Pan était heureux. Feliks était heureux. Ils étaient enfin heureux.
Mais saturne avait tout gâché encore, il ne devait pas être définitivement ami avec l'univers, ça faisait des coups en douce l'univers. C'était un mot trompeur, c'était un piège à touristes. L'uni-vers. Il s'unissait pour les faire sombrer uniquement. Il les enfermait dans cette chute où Pan et Feliks venaient de s'engouffrer. Ils venaient de s'unir avec cette démente. C'était évident, c'était maladroit de s'y aventurer. Mais ce n'était pas que de la faute de Feliks. Il tenait responsable Pan pour une partie de ce chamboulement, c'était de sa faute s'ils étaient ailleurs, s'ils étaient dans le néant. Feliks, il avait du mal à réfléchir. Feliks, il prenait son ami pour un inconscient. Mais, il savait très bien que c'était son travail de l'avertir et il ne l'avait pas fait. Feliks ne savait plus. L'aviateur ne savait absolument plus qui prendre pour responsable. Est-ce qu'il y en avait un ?
Il était secoué dans tous les sens, il ne reconnaissait ni la droite, ni la gauche. Il ne reconnaissait même plus saturne qui s'en allait. Jupiter l'accompagnait tenant la main à toutes les autres planètes. Il ne reconnaissait plus les nuages qu'ils n'auraient jamais dû abandonner. Il ne reconnaissait plus l'astre de feu qui s'éloignait encore plus que les autres images qui paraissaient et disparaissaient dans des mouvements saccadés, battant trop fort, même plus fort que les froissements de son coeur en train de s'emballer. Ils étaient projetés comme des billes jouant à affronter le néant. Bravo Feliks, bravo pan, vous avez encore gagné une autre bille. Bravo le néant tu viens de gagner Pan. Bravo le vide tu viens de gagner Feliks. Tu les ramasses, tu les enveloppes de ta nappe noire. Lâche-les à la fin. Alors, subitement Feliks il sentit tout se calmer autour de lui, peut-être parce qu'il n'y avait plus rien à voir et sans repère il ne pouvait plus savoir si tout bougeait encore à côté de lui ou s'il continuait à se balancer.
Il se rendait finalement compte que c'était Pan qui était en train de l'aider, il se rendait compte qu'une décharge était en train de l'emplir de colère. Il se rendait compte qu'il se trouvait sur un éclair, flottant dans la noirceur. Il essayait de se contrôler pour ne pas montrer qu'il avait mal, mais ce n'était pas facile de souffrir en silence quand le silence n'était rien d'autre que la couverture qui les abhorrait
Il s'attachait enfin à quelque chose qui s'évadait dans le rien.
- Ça va ?

Il ne fallait pas supplier Feliks pour répondre à cette question stupide. Il ne fallait peut-être même pas pondre cette question : Comment veux-tu que j'aille ? Comment veux-tu que ça aille ? Demandait-il trop fortement dans l'écho des limbes ténébreuses. On n'aurait jamais dû monter sur ses anneaux, tu n'aurais jamais dû nous forcer à y aller, ce n'était pas cohérent et Feliks il oubliait qu'il n'y avait pas de coupable et que s'il devrait en avoir un : il serait l'unique criminel. Il devrait répondre à ses actes. Tu me fais mal avec ton stupide éclair, depuis que je te connais tu n'as fait que me faire mal, il oubliait aussi qu'il le considérait comme un ami auparavant. Mais les mots s'enchainaient quand même, J'ai été bête de t'avoir conduit ici. Il aimerait que le silence prenne sa place Feliks, il aimerait être le silence en lui-même. Que le silence commence par la lettre F, comme le filence, filante. Mais il n'arrivait pas à se contenir. Les mots s'envolaient, les mots prenaient leurs ailes comme les étoiles filantes, le silence devenait indéniablement filant. Désolé Pan. mais,... j'ai peur à présent.

Elle fuse, la réponse, comme une étoile filante qui passerait par là pour les secourir. Mais qui n'arrive jamais et qui laisse Feliks et Pan en plan, accrochés à un éclair repoussant.
- Comment veux-tu que j'aille ? Comment veux-tu que ça aille ? On n'aurait jamais dû monter sur ses anneaux, tu n'aurais jamais dû nous forcer à y aller. Tu me fais mal avec ton stupide éclair, depuis que je te connais tu n'as fait que me faire mal. J'ai été bête de t'avoir conduit ici.
Durs, les mots, et salées, les larmes que crachent les yeux de Pan. Son cœur est prêt à exploser de déception, la déception que Feliks se mette à penser comme les autres, à crier qu'il pique, trop, trop fort, qu'il fait mal.
- Désolé Pan. mais,... j'ai peur à présent.
Sourire au milieu des larmes.
Il soupire, Pan, et ça foudroie dans ses côtes, mais là, c'est le temps pour l'histoire. Rien de mieux pour ça que d'être suspendus au bout d'un éclair-cactus, avec, au bout du bras, le plus grand aviateur du cosmos.
- Un jour j'ai croisé un nuage. Il était aguicheur, confituré de soleil, et moi, j'ai voulu le goûter. À peine je l'ai eu touché qu'il me mordait à coup d'éclairs que mes poumons ont absorbé. J'ai cru mourir, et pendant quelques jours, j'étais fluorescent de lumière d'orage, je brillais dans la nuit et tout ce qui va avec. J'ai repris ma couleur normale après, mais évidemment je pouvais plus toucher les gens ni rien. Ça se repend les bruits de foudre. Et moi, du bruit, j'en fais. Je suis désolé, mais les bouts d'orage coincés en moi, je les crache petits bouts par petits bouts. Un jour j'en serais vide et je reviendrai un garçon normal. J'espère que tu voudras bien être mon ami, à ce moment-là.

- [...] J'espère que tu voudras bien être mon ami, à ce moment-là.
Va falloir que tu dises vraiment ce que tu penses, Feliks. Et que t'arrêtes de te laisser emparer par tes mauvaises émotions. après tout il n'y peut rien lui. Ce n'est pas de sa faute.
Mais tu comprends enfin, il vient de te l'écrire sur le mur d'étoile : son histoire ; Ca te ferait presque pleurer. versé une larme à ton tour, comme celle de Pan. Elles ont le gout du fer les tiennes. Elles sont sombres. Trop sombre. C'est le temps pour toi aussi de te confier, t'as plus qu'à prendre ta plume et écrit-lui aussi ton histoire.
- Je suis désolé pour toi, je suis sûr que t’arriveras à redevenir un garçon normal. Si je pourrai t'aider je l'aurais déjà fait. Mais je ne sais que me voiler, j'étale les mensonges en forme d'épine partout où je vais. Je ne suis pas vraiment le plus grand aviateur du monde, j'étais perdu quand tu m'ais tombé dessus, dans le nuage là en bas. L'aigle mécanique a été farceur et m'a laissé seul trop loin de chez moi. Et comme toujours je finis par faire piquer quelqu'un avec moi. Je n'arrive même pas à voler sur les anneaux de saturne. Un vrai aviateur saurait le faire. pas moi.
Tu le remercies du regard, pour t'avoir écouté, pour s'être confié à toi aussi. Tu te rends compte à quel point tu lui ressembles sur de nombreux points. Et là t'essaye de prendre sa main, tu t'en fous des picotements et des coups de jus. T'a besoin de lui et il a besoin de toi.
- T'es déjà mon ami.

Spoiler:

Au bout de ses doigts, l'aviateur commence à glisser, il échappe à Pan. Est-ce que c'est une belle métaphore pour dire non ? Non, toi, moi, pas, amis, jamais. Les larmes reviennent, ou continuent leur voyage sur les joues de l'enfant du tonnerre.
- Je suis désolé pour toi, je suis sûr que t’arriveras à redevenir un garçon normal. Si je pourrai t'aider je l'aurais déjà fait. Mais je ne sais que me voiler, j'étale les mensonges en forme d'épine partout où je vais. Je ne suis pas vraiment le plus grand aviateur du monde, j'étais perdu quand tu m'ais tombé dessus, dans le nuage là en bas. L'aigle mécanique a été farceur et m'a laissé seul trop loin de chez moi. Et comme toujours je finis par faire piquer quelqu'un avec moi. Je n'arrive même pas à voler sur les anneaux de saturne. Un vrai aviateur saurait le faire. pas moi.
Oh les mots se réveillent à l'intérieur de Pan, meurent d'envie de répondre, mais non, mais non dis pas ça, bien sûr que t'es un grand aviateur, allez, dis-moi que c'est vrai, parce que si t'es pas un aviateur alors t'es quoi ? Si t'es pas un aviateur et moi un garçon condamné à pleurer, sourire, donner de l'orage, on est mal barrés.
- T'es déjà mon ami.
C'est ça la réponse, Feliks, il l'a, c'est l'amitié qui va faire que Feliks aura toujours une oreille sur laquelle déverser des histoires de folie, des histoires d'étoiles, et que Pan arrêtera de piquer tout le monde, puisqu'il aura Feliks à chatouiller à coups d'amour.
L'enfant, il lève des yeux brillants sur un ciel qui tient du miracle : explosions colorées cachées sous les nuages.
Un d'eux, d'ailleurs, décide d'écourter les souffrances de l'apprenti aviateur et du bébé éclair en s'offrant comme taxi.
- Allez, je vous emmène où les garçons ?
- Là où on voudra bien de nous, monsieur l'nuage.
Pan, il laisse Feliks grimper à l'avant et s'accroche à sa taille au cas où ils auraient encore affaire à un nuage glouton du genre qui te grignote les fesses.

Pan l'écoute. Et Feliks sait que ça parvient à ses oreilles sans sortir par un autre orifice pour se distendre dans l'air, comme s'il avait oublié de fermer la cage à oiseaux. La cage à mots.
C'était peut-être un peu prématuré cette révélation. On lève le voile. Mais il avait besoin de ça, Feliks, pour se sentir mieux. Pour moins se sentir perdu. On raconte tout à ces amies, presque tout. Il pourra arrêta de parler à ses lunettes d'aviateur, il pourra s'en servir comme il se doit. Il pourra peut-être piloter bien plus haut maintenant. Et dans un sens, être arrivé juste aux étoiles c'est déjà un exploit. Il y en aura eu des choses. Il pourra raconter ça une fois rappliqué en bas.

Mais il n'a pas vraiment le temps de réfléchir Feliks que ça redevient rouge, c'est comme un rêve. On passe à une autre étape. Retour en arrière. Retour de maitre, miraculeux. C'est loin, mais dans l'adversité de l'univers les nuages paraissent à portée de main. Tellement près qu'y'en a même un qui s'approche d'eux. C'est rapide un nuage, c'est léger.
- Allez, je vous emmène où les garçons ?
- Là où on voudra bien de nous, monsieur l'nuage.
Pan il laisse passer Feliks devant lui. P'tet que le nuage ne va pas le supporter et va faire un bon à travers son coton ? P'tet qu'il va finir par vraiment le mordre, un coup sec et plus de Feliks en vue. Plus jamais. Mais il s'en fout, c'est comme leur dernier espoir, il n'y en aura certainement pas d'autres. C'est ça ou rien. Le nuage ou la fin. Alors, il pose un pied sur la douce soie blanche, puis une autre pour finir assis sur le siège en laine. C'est doux. Ça n'a pas changé. C'est doux, heureusement.
Puis il lance sa main à Pan, pour l'aider à monter lui aussi, sans se soucier de rien. Ils vont rentrer à présent. C'est pratiquement fini.
- Tu sais, je suis sur que plus jamais on ne piquera à présent, moi avec mes mensonges, toi avec tes éclairs, même si c'est juste pour se protéger que Feliks fait ça.
Il est temps de devenir normal.

L'enfant entend les mots de l'aviateur, lointains, et puis les recommandations du chauffeur-nuage aussi, à des années lumières d'eux (ne pas se pencher en avant, ne pas se pencher arrière, ne pas se pencher sur les côtés, oh, ce qu'ils sont rébarbatifs ces taxis).
- Tu sais, je suis sur que plus jamais on ne piquera à présent, moi avec mes mensonges, toi avec tes éclairs. Il est temps de devenir normal.
Sa voix est douce. Comme les nuages (quand ils ne vous bouffent pas le derrière), comme le coton, comme le lait au chocolat, comme le vent à la naissance du printemps, comme les chats quand ils dorment, comme les gâteaux aux amandes.
Douce comme un oreiller.
Et puis un lit.
Alors Pan s'endort.
Quand Pan tombe dans le sommeil c'est merveilleux, merveilleux pour lui qui n'a plus à avoir peur de toucher quelqu'un, d'embrasser une fille sans lui faire de mal.
Qui n'a plus qu'à faire des rêves comme tout le monde, des cauchemars aussi un peu pour pimenter les choses. Mais surtout des rêves pour un garçon avec qui la vie est un peu garce. Des rêves de trucs qui volent, de trucs qui caressent, de nuages affectueux.
Quand il se réveille c'est le grand bleu.
Grand ciel bleu, avec le soleil qui se marre, et les étoiles qui sont parties se coucher.
Pan, il gesticule, il remue, c'est beau ici mais c'est où, ici ? Il tourne la tête et les yeux avec. Il y a Feliks. Il drague le soleil.
- Oh bah ! T'es resté !

- Je crois que...
Mais Pan il s'est endormi, le nuage a endormi Pan. Il est beau Pan quand il dort, mais il ne paraît plus vraiment vivant.
Heureusement qu'il a un souffle Pan, c'est ce souffle qui chante dans l'univers alors qu'ils approchent de plus en plus près de la Terre. C'est ce souffle qui maintient Feliks réveillé.
Il n'a pas sommeil de toute façon.
C'est à croire que les autres nuages ont acclamé leur entré dans l'atmosphère, ils leur ont laissé un long tapis rouge pour rejoindre nos mers. nos mères.
Mais Pan il change de souffle, Pan il commence à frétiller, il se met même à prononcer quelques mots dans son sommeil. Mais Feliks sait que ce n'est pas un cauchemar ce coup-ci, c'est écrit sur les paupières de Pan. C'est écrit sur ses lèvres qui se colorent en un rouge joyeux. rouge bonheur. rouge tout court. comme la première fois.
Alors que tout autour est devenu bleu, ce n'est pas la même couleur, c'est beau le bleu. Mais pas aussi jolie que le nouveau rouge. Et il laisse Pan dormir. Gaiement.

Il contemple le soleil, il n'a toujours pas changé, c'est toujours le même depuis qu'il était parti, peut-être que la Terre elle aussi est pareille, n'a toujours pas changée.
Il n'entend plus le souffle de Pan, il le sent se lever, le regarder. Il sent même ses lèvres rouges bouger.
- Oh bah ! T'es resté !
- Je ne voulais pas que tu te réveilles seul, il aurait pu être déboussolé, il ne semble même pas savoir où on est. Tu as dormi une éternité, Pan. Peut-être jusqu'à l'infini. Mais c'est bon Pan, on est arrivé. On a retrouvé le chemin. On est chez nous.
Y'a quelques étoiles qui se glissent dans les yeux de Feliks, le soleil lui fait un clin d'oeil aussi. Puis c'est à son tour de colorier ses lèvres d'un rouge joyeux. rouge bonheur. rouge tout court... comme la première fois.

FIN.