'CAUSE MISERY IS WAITING ON ME
Cause du décès ; noyade. Ce sont ces lettres qui seront gravées sur ton certificat de décès une fois qu'elle en aura terminé avec ta carcasse. Ses mains aux ongles parfaitement manucurés, pressées contre ton torse fragile, te contraignent à rester sous l'eau. Elle a les yeux fermés, ses membres prêts à lâcher, le cœur au bord des lèvres. Les larmes qui perlent le long de sa joue, s'écoulant lentement dans l'eau fluide de la baignoire, sont là pour rappeler qu'elle est humaine. Consciente de ce qu'elle fait. Elle ira en enfer. Son âme brûlera en enfer sans que personne ne vienne l'aider. D'un revers de la main, elle sèche ses larmes en sanglotant sans retirer son autre main pour finir le travail. Toi, tu ne bouges plus. Tu t'es débattu un moment, tu as essayé de remonter à la surface, hurler pour ta survie. Tes poumons s'étaient bien vite remplis d'eau, ta respiration s'était stoppé et tes cris avaient cessé. Les lèvres tremblotantes, la bouche sèche, elle murmura quelques mots en baissant la tête vers le sol comme pour faire une dernière prière avant ton grand départ.
« Repose en paix ... » Elle n'eut pas le temps de poursuivre, nul mot ne vinrent compléter sa phrase. Un bruit de porte s'était fait entendre, son mari. Ton père. Elle n'avait pas bougé, à quoi bon ? Relevant sa main de l'eau, malmenée par la flotte, elle l'essuya sur son haut sans relever les yeux. Les pas de ton père se rapprochaient, sa respiration commençait à se faire entendre et sa voix, bientôt roque, s'éleva dans les airs.
« Ma puce ? Tu es là ? » Un ton jovial qui n'allait pas tarder à se taire. Debout devant la porte, les yeux fixés vers l'eau, il avait un regard horrifié sur ton corps qui était remonté à la surface. L’incompréhension, puis la tristesse, pour finir par une colère incommensurable. Se jetant sur ta mère, il la poussa pour qu'elle s'enlève et récupéra ton corps dans le liquide bleu, liquide de la mort. Tu avais les lèvres bleus, le corps frigorifié et les membres lourds.
« APPELLE UNE AMBULANCE ! » Non. Tu ne passerais pas de vie à trépas. Pas maintenant. Pas ce soir. Pas tant que ton père serait là, que ses bras te porteraient. Ta génitrice, elle, ne réagit pas. Elle reste immobile, comme absorbée par son chef d’œuvre. Un regard indescriptible. Possédée. Les urgences ne mirent pas longtemps à arriver, mais assez pour enlever à ton père le peu d'espoir qu'il lui restait. Il ne comprenait pas. Il avait beau se creuser la tête, il ne savait pas ce qui était passé par la tête de son épouse quand, pendant qu'elle te prenait ton bain, une folie meurtrière s'était emparée d'elle, de son corps, de tout son être. Ton état critique. La mort te tendait les bras pour que tu les saisissent. Tu serais partit trop tôt, cinq ans.
Voilà des heures qu'il était là. Harassé mais inquiet, à veiller sur toi.
« Il est dans un état stable. » La voix venait de derrière, prêt de la porte. Une infirmière se tenait là, rouquine, une chevelure de rêve et les dents du bonheur.
« Votre fils a été considéré cliniquement mort pendant exactement douze secondes. Nous sommes parvenus à le réanimer mais rien ne nous permet de dire avec certitude qu'il s'en sortira. Il est fort, mais la quantité d'eau dans ses poumons était colossale. Même s'il s'en sort, il faut que vous sachiez qu'il aura des séquelles importantes. » Il s'en moquait. Tout ce qu'il voulait c'était son fils, son petit prince. Il voulait aussi la vérité, le pourquoi du comment. S'il n'était pas arrivé à temps, son fils serait au fond d'un trou à pourrir et se faire bouffer par des vers. Et cela, à cause de la femme qu'il aimait. Celle qu'il avait épousé et juré de couvrir de bonheur jusqu'à ce que la mort les sépare. D'un hochement de tête, il fit comprendre à l'infirmière qu'il avait comprit. Qu'elle pouvait s'en aller.
« J'aimerai être seul avec lui... » Les mains jointes sur ses genoux, il se redressa sur son siège pour te regarder, tu avais l'air si paisible. Un sourire s'étira sur les lèvres de ton père qui pouvait au moins se dire que tu serais mort heureux. Une main se posa sur son épaule carré, un geste emplit de compassion. Pendant qu'il s'agissait du médecin, monsieur Pearson enleva son épaule d'un air agacé.
« Je vous ai dis de me laisser ! » Mais ce n'est pas la tignasse rousse qui se tenait devant lui, mais les longs cheveux blonds de ta mère, le teint blafard et les yeux vitreux. Il n'en fut que plus irrité. Comment osait-elle venir ici après ce qu'elle avait fait à son propre fils ? Le fruit de ses entrailles, la chair de sa chair. Celui qu'elle avait tant attendu pendant neuf longs mois.
« Je ne voulais pas le voir mourir... Le docteur Spencer m'a appelé pour me dire qu'il avait une maladie infantile... Je voulais pas le voir souffrir... » Acrodynie. Il était simplement atteint d'acrodynie. Une maladie infantile qui se guérissait seul, aucun traitement n'était proscrit et sa santé n'était pas en grand danger. Apparemment, elle n'avait pas comprit. Mais à cause de l'incompréhension de ta mère, tu allais vivre avec les séquelles.
DOWN THE DARKEST ROAD
Le marteau était en l'air, prêt à s'abattre de pleine puissance sur le burin que tu tenais fermement de ton autre main. Des copeaux de bois volaient dans les air à chaque coup que tu portais. Ils se dispersaient dans ce qui te servait de chambre. C'était plutôt ton atelier avec un lit et un mini bureau qui servait à ranger tes outils. C'était ton havre de paix et personne n'avait le droit d'y entrer sans permission. Ici tu pouvais respirer, tu pouvais vivre. C'était le seul moyen d'être seul, de ne pas avoir tes parents sur le dos. Les personnes sur cette terre étaient bien trop collants, une bande d'hypocrites qui essayaient juste d'avoir des combattants de leur côté pour l'heure de la bataille. Tu attendais que la race humaine s'entretue pour aller compter les cadavres. Recenser le nombre de con qui se seront fait avoir. Tu n'en ferais pas partit. Tu étais en sécurité entre les murs de ta chambre, un cocon qui te préserve de la connerie humaine. C'est dans ce cocon rassurant mais confiné que tu te sentais bien, en sécurité. Le morceau de bois commençait à prendre forme peu à peu. Avec des outils plus petits, plus précis, tu te rapprochas de ton œuvre pour faire des motifs plus minutieux. Des ailes. Les ailes de ton ange. Tu ne savais pas réellement pourquoi tu faisais cette sculpture. Tu pouvais prétendre qu'il ne s'agissait que d'une nouvelle pièce à tes actifs, et mais tu savais que la raison était tout autre. C'était pour offrir. Un homme. Amoureux ? Non. Surtout pas d'un être masculin. Alors tu te demandais pourquoi tu te sentais forcé de lui offrir un présent, une statue à son image. Un ange descendu du paradis pour venir sauver un pauvre humain dans le mal de la vie. Il t'avait tiré de bien des galères. Tu lui devais énormément de chose. Un bruit te sortie de tes songes alors qu'avec la plus grande concentration, langue tirée, tu refaisais les contours des sublimes plumes de l'être angélique.
« Encore en train de faire de l'art ? » Un petit rire moqueur s'échappe de ses lèvres de pute, elle se fou de toi ouvertement.
« Qui t'a autorisé à entrer ? » Tu sens qu'elle se rapproche. Elle ne répondra pas à la question, certainement vexée par le ton que tu as employé. Voilà maintenant trois semaines que tu étais au courant pour l'incident qui s'était produit sous ce toit lorsque tu n'étais qu'un gamin. Toute ta vie tes parents t'avaient répété que tu avais faillit te noyer dans ton bain, une minute d’inattention était la cause de tous ces tracas. Chié. Quelles conneries. C'était elle qui t'avait fait ça, tu le savais maintenant. Ton père, après une dispute endiablé avec ta mère avait vendu la mèche, devant toi, et tes oreilles n'en avaient pas perdu une miette.
« Dis ce que tu veux, nous savons tous les deux que dans quelques mois tu viendras me voir pour me supplier de t'embaucher au cabinet. Et ce jour là tu ne seras plus le bienvenue, mon cher fils homo. » D'un revers de la main, elle frappa la statuette qui alla s'écraser sur le sol avec perte et fracas. Une longue fissure se forma le long de l'aile couleur ébène pour finalement tomber. La pute. Tu levas un regard plein de haine vers ta mère avant de lui cracher au visage.
« Va te faire foutre. » Cette fois-ci, tu n'avais pas mâché tes mots. Ramassant le cadavre de ton ange à terre, tu pris tes outils et quitta la maison sans demander ton reste. Ta mère était une salope. Enfant gâtée qui serait à la rue sans l’organisme que lui avait cédé sa belle famille. Seul ton père tenait la route, mais ce con était bien trop soumis à sa femme pour te défendre. Lorsqu'ils s'engueulaient, ton père allait toujours, la queue entre les jambes, lui demander pardon à genoux. Tu n'avais nul part où aller mais tu t'en branlais. Tout ce qui était important pour toi à cette heure précise était de partir d'ici. Le plus vite possible. Rejoindre ton ange en levant le doigt vers ta mère après avoir lancé un énième.
« Je ne suis pas gay ! »YOUR LIPS ARE VENOMOUS POISON
Ton sauveur. Il t'avait recueillis alors que tu n'avais nul part où aller. Impossible de demander quoi que ce soit à ton patron. Ce n'est pas qu'il t'effraie, c'est que tu sais bien qu'il n'est pas le mieux placé pour te rendre service. Il t'avait déjà sauvé la mise en t'embauchant, il n'allait pas non plus te trouver un toit. Il ne fallait pas abuser. C'est donc dans l'appartement de Jeff que tu avais terminé la journée. Il t'avait accueillit avec grand plaisir et semblait éblouis par la sculpture que tu lui avais offerte. Il lui manquait un bout et elle n'était pas complètement affiché mais il s'en moquait complètement, il aimait répéter que c'est ce qui lui donnait du charme ; son vécu. Tu étais assis sur son lit, un sac de fringue à tes pieds et ton ami à tes côtés.
« Tu es sûr que je ne gêne pas ? » Un sourire s'étira sur les lèvres de ton ange. Il secoua la tête négativement avant de se relever.
« Au contraire, j'ai besoin de compagnie. Par contre je n'ai qu'un lit et le canapé est tout sauf confortable alors évite de ramener tes conquêtes ici. » Oups. Un lit. Non, cela n'allait pas le faire. Tu avais besoin d te retrouver seul. S'il avait été une fille, tu aurais sauté sur l'occasion, tu te serais déjà déshabillé pour lui faire des folies. Mais pas un mec, c'était hors de question. Tu refusais de t'imaginer son corps contre le tien, vos langues entremêlées, c'était trop douloureux. Pas parce que cela te dégoutait, mais parce qu'au contraire tu en bandais d'avance. Ce serait la pire des choses, vous deux, toi, gay. Non. Tu n'étais pas un pédé. Haussant simplement les épaules, tu lui souris pour ne pas montrer ton malaise.
« Ne t'en fais pas, on fera ça sous la douche. » Et c'est ce que tu fais. Tu ramènes bien souvent des femmes chez vous, et tu les baises sous la douche. Sous les yeux de Jeff qui a envie de les virer de chez lui et te prendre à la place. Il avait bien raison, le vrai amour sonne mieux que le sexe.